Le Moniteur de la Lozère – 1889 / 1938
Lorsque j’ai retranscrit les rubriques locales de La Croix de la Lozère j’ai exprimé mes regrets de ne pas avoir eu accès à l’hebdomadaire concurrent Le Moniteur de la Lozère et donc de ne pas être en mesure de mettre en face des articles polémiques des « réactionnaires » les réponses des « républicains » dont le Moniteur était le porte parole.
Le Moniteur était en effet le journal du « Cercle Républicain ». Sous titré « journal progressiste » il devient « journal démocrate » le 10 août 1902.
Il est créé en 1864 et il est donc bien plus ancien que La Croix mais, à ses débuts, c’était, un journal d’annonces.
Je n’ai pas eu la possibilité de remonter jusqu’aux origines du journal et le recueil débute, comme pour La Croix de la Lozère, à l’année 1889.
Dans le précédent recueil, j’émettais l’hypothèse que, si les défenseurs du parti catholique étaient souvent violents dans leurs attaques, les « francs-maçons » ne devaient pas de leur côté « tremper leur épée dans l’eau ». En accédant, enfin, au Moniteur j’ai pu constater que je ne m’étais pas trop lourdement trompé.
Mais je persiste dans mon affirmation, qu’en dehors des périodes électorales, « républicains » et « réactionnaires » étaient les meilleurs amis du monde.
Je me souviens, notamment, des défilés du 11 novembre, dans lesquels les anciens combattants, quelque soit leur « bord » étaient au coude à coude, et partageaient la même émotion lorsque le François (M. Savajols) faisait retentir, au clairon, la sonnerie aux mort à la mémoire de leurs camarades disparus. Oserais-je ajouter que cette fraternité se montrait, encore, plus démonstrative à l’issue du repas copieusement arrosé, qui, après la cérémonie, les réunissait tous jusqu’à fort tard dans la nuit.
Je constate également, avec regret, que les correspondants du Moniteur partageaient avec ceux de La Croix la même la même parcimonie dans leur production.
Néanmoins les articles que je vous livre donnent, je crois, une image un peu plus complète de la vie dans notre village.
J’ai donc, comme dans le précédent recueil, retranscrit la totalité des articles concernant le Bleymard (mais aussi nos voisins de Cubières et d’Orcières), même ceux ne présentant, peut-être pas, un grand intérêt. Considérons ces textes, comme le fait le rédacteur du Moniteur dans son message d’adieu, en 1938 (voir in fine) : « …des informations certes un peu vieillottes et, à la vérité, peu retentissantes, mais fleurant bon le sain terroir Lozérien. »
Certains des faits divers se trouvent dans les deux journaux, mais c’est, curieusement, assez rare et, dans ce sens, les deux recueils se complètent l’un l’autre.
Je souhaite que les lecteurs trouvent un certain plaisir à lire ces compilations et, peut-être, comme moi, une réelle émotion à retrouver ceux qui les ont précédés dans notre cher village.
Ce sera ma modeste et ultime contribution et, à cette occasion, j’adresse à mon ami Didier et à son si sympathique personnel mes très vifs remerciements pour l’aide qu’il m’ont apportée dans la diffusion du livre Lou Bluma puis du recueil de La Croix, et je remercie, tout aussi chaleureusement, sa nièce, Maëlle, qui a accepté spontanément de vous distribuer le recueil consacré au Moniteur.
Articles des correspondants locaux
du Moniteur de la Lozère
1. Année 1889
27 janvier 1889 – Cubières – Enterrement civil
Nous avions promis au sujet de cet incident des détails complémentaires. En voici que nous donnons sur la foi d’un témoin oculaire.
La cause première de cet événement peu catholique ne serait que le clergé lui-même. La famille n’eut jamais songé à se mettre en révolte contre l’Église, si elle-même ne l’y eut amenée.
Le défunt rendit l’âme vers les 9 heures du soir et le lendemain de grand matin, un parent s’en fut prévenir le curé et le prier de fixer l’heure à laquelle devait avoir lieu la cérémonie funèbre. Il était matin, trop matin, la servante goguenarde répondit de l’absence du curé. Force fut donc d’attendre : et c’est ce que l’on fit du reste une heure et même deux, devant la cure. S’il fait mauvais dehors, il fait meilleur, emmitouflé dans un bon lit et le premier messager dût renoncer à accomplir sa mission. Un second survint quelques heures après qui reçut un accueil semblable ; le curé n’y était toujours pas. Puis un troisième, une femme, qui déclara de guerre lasse, à la servante que, si Mossieu le Curé était absent si obstinément, c’est qu’il voulait l’être et qu’on se passerait fort bien de lui.
Anathème ! Trois et quatre fois anathème !! Le Curé qui pour avoir été trié par le seigneur lui-même parmi les meilleurs des hommes se ressentit en ce moment de son impure origine. Il bondit à cette déclaration : une porte s’ouvre et l’absent perpétuel devient tout à coup présent. Il stigmatise comme il convenait l’audace de cette femme assez impie pour avoir osé se plaindre de lui, le pur des purs parmi les chrétiens, le représentant de la divinité, l’héritier direct du Christ, je vous dis bien, mais non pas de sa patiente vertu.
Il la renvoya donc avec son blasphème et le lendemain l’enterrement eut lieu sans lui et sans autre cortège que celui qui suit ordinairement les morts que l’on porte en terre dans la commune.
Et personne n’aurait crié au scandale sinon le curé lui-même : Était-ce la conviction que cette âme accompagnée seulement des regrets et des larmes de sa famille et de ses amis ne saurait pas trouver seule le chemin du paradis, elle innocente de ce qui se passait ? Était-ce le regret chez lui de perdre l’obole que nous sommes et seront longtemps obligés de payer au prêtre à notre naissance et à notre mort et dans toutes les circonstances où il peut nous faire payer ? Nous ne savons ce qui le fit agir et cependant tout nous porterait à croire que le mobile du curé en la seconde phase de l’enterrement de Cubières fut celui-là. Quand on a fait preuve d’une impatience aussi humaine que celle qu’il montra au commencement, il n’est pas téméraire de prêter à un homme ce second défaut tout aussi humain, l’amour du lucre.
Toujours est-il que, le lendemain les députations succédèrent aux députations auprès de la famille. Le vicaire, les religieuses même s’en mêlèrent : on menaça la veuve désolée des flammes éternelles, du refus de tous les sacrements si elle ne consentait pas à l’exhumation du corps enfoui sans chansons funèbres, sans prières psalmodiées par le prêtre qui à si souvent, pendant ce temps-là, l’esprit occupé ailleurs. Tant et si bien qu’on la décida et que, le lendemain, sous la direction du vicaire, quatre fossoyeurs procédaient à la lugubre opération.
Après la cérémonie civile, comme le dit le correspondant du Courrier, la cérémonie religieuse eut lieu de la même façon que s’il se fut agi d’un mariage : Il oublie d’ajouter, pour compléter la ressemblance, qu’entre la cérémonie civile et la cérémonie religieuse, toujours sous la présidence du même homme, il y a eu une cérémonie bachique – Il eut été par trop lugubre d’enterrer un mort si l’on n’avait eu soin d’égayer les fossoyeurs. Un litre de tord-boyaux à quatre, tiré à l’auberge la plus voisine, servit à leur donner plus de cœur à la besogne, plus de cœur et même plus de gaîté qu’il n’eût fallu.
Ensuite on procéda, religieusement, à la ré-inhumation.
Bon Dieu, si tu savais tout ça, ne serais tu pas plus indulgent qu’un évêque ?…
Ndr : Le même fait divers est rapporté par La Croix, avec, évidemment, un éclairage quelque peu différent : La Croix – 09 février 1889 – Cubières – Enterrement sans prière (extraits).
2. Années 1890
30 mars 1890 – Cubières – Accident
Le sieur Gourdouze (Aug.) âgé de 48 ans, travaillait dans un pré, à réparer un mur de soutènement. Sa fille Irma-Joséphine, âgée de 4 ans ½, l’avait accompagné. Pendant qu’il s’occupait, l’enfant, assise dans le pré s’amusait. Tout à coup un bloc d’un rocher qui se trouve au dessus du mur de soutènement en réparation, se détacha et, en tombant, atteignit l’aile du chapeau du père, puis, roulant le long du pré, alla écraser l’enfant.
La mort fut instantanée.
04 janvier 1891 – Le Bleymard – Incendie
La maison du sieur Mouret, sise au Maazel, a été la proie des flammes.
Mouret a communiqué le feu à la maison en désinfectant une écurie dans laquelle était crevée une jument atteinte d’une maladie infectieuse. Pour purifier l’air, il faisait brûler un tas de paille qui mit le feu à la maison très rapidement.
24 janvier 1891 – Le Bleymard – Egarés
Samedi dernier, deux voyageurs, un marchand ambulant, Antoine et sa femme, originaires d’Aurillac, ont été surpris par la tourmente au col des Tribes, entre le Bleymard et Cubières. Après avoir marché, au hasard, pendant quelques heures, ils se sentaient perdus, lorsque le son des cloches du village de Cubières, dans le voisinage duquel ils étaient arrivés, les a guidés !
Ils sont arrivés, exténués et ont reçu les soins empressés de l’aubergiste.
Malheureusement le mari a eu les mains gelées et les médecins craignent que l’amputation ne soit nécessaire.
08 février 1891 – Saint-Julien-du-Tournel – Le croup
Cette terrible maladie a fait son apparition dans la commune. Quatre enfants en sont morts dans une semaine et un cinquième est gravement atteint.
Le Maire de Saint-Julien et le docteur Chevalier de Bagnols ont prescrit les mesures pour éviter la propagation de la maladie et qui consistent essentiellement en la désinfection des appartements et des linges et en l’enfouissement immédiat des excrétions et de déjections des malades.
Les enfants qui ont été dans le voisinage des malades ou qui ont été en contact avec eux devront faire l’objet d’une surveillance, de soins spéciaux et ne devront pas fréquenter l’école de quelque temps.
Ndr : Progressivement éradiqué par de vaccin du Dr Roux (1894)
12 novembre 1891 – Le Bleymard – À La Croix ?
Depuis quelque temps, La Croix et le Courrier de la Lozère ne s’occupent que des instituteurs de notre canton.
Si Messieurs les correspondants des feuilles cléricales voulaient nous le permettre, nous leur donnerions, en ami, un petit conseil :
Au lieu d’employer vos moments de loisir à calomnier des instituteurs qui s’efforcent de faire tout leur devoir, rendez-vous sur le penchant Nord-Est du Mont-Lozère et allez faire, avant que la neige arrive, des aspersions d’eau bénite au Saint-Point-de-Repère, lieu sanctifié par les nombreuses rencontre et les nombreuses parties de plaisir d’un grand saint portant une grande robe noire avec une non moins grande Notre-Dame, habillée de toutes les couleurs.
Votre besogne sera plus simple et plus profitable.
1ᵉʳ mai 1892 – Cubières – Tué par le mauvais temps
Le nommé Pagès (François), âgé de 64 ans, propriétaire à Neyrac, commune de Cubières, partit le 20 avril pour se rendre au Pont-de-Montvert. À son retour, il a été surpris, sur le Mont-Lozère, par le mauvais temps. Le vent du Nord qui soufflait avec violence, l’a projeté sur un rocher.
Il s’est fait une blessure au dessus de l’œil droit.
Son cadavre a été retrouvé trois jours après.
13 décembre 1892 – Le Bleymard – Bagarre
Malgré un peu de pluie, notre foire du 8 courant a été belle et les transactions nombreuses.
Malheureusement, il a fallu qu’elle fût clôturée par un accident regrettable.
Vers les 8 ou 9 heures du soir, quelque habitants de la vallée du Chassesac, dînaient paisiblement, en attendant le clair de lune, à l’auberge Reboul. À ce moment quelques chenapans de la commune de Saint-Julien-du-Tournel, saouls comme des barriques, sont venus les invectiver et, finalement, les assommer à coups de bouteilles. (Le sieur D. de Chazeaux a reçu une entaille à l’œil droit, mesurant 5 cm de large sur 2 de profondeur.)
Heureusement pour les assaillis, notre vaillant brigadier, M. Calandini, s’est amené comme par enchantement et, avec l’énergie et l’habileté qu’on lui reconnaît, il a eu vite fait de mettre les agresseurs à leur place, avec promesse de les faire mettre à la raison ! Et ce ne sera pas trop tôt car ces gredins n’en sont pas à leur coup d’essai. Depuis quelques années soit à Saint-Frezal, soit à Bagnols-les-Bains ou ailleurs, ils n’ont cessé de parcourir fêtes votives et foires en quête de tapage.*
Nous espérons, cette fois que la leçon qu’ils ne manqueront pas de recevoir, sera bonne et profitable. Ainsi soit-il !
*Ndr : déjà des « sauvageons » ?
27 avril 1893 – Cubières – Mort subite
Le 14 avril courant, vers 10h du matin, le nommé Folcher François, âgé de 47 ans, journalier à Cubières, a été trouvé sur la route nationale, complètement inanimé.
D’après l’avis des médecins, Focher a succombé à une rupture d’un anévrisme.
25 mars 1894 – Le Bleymard – Conseil de révision (extraits)
Jeudi dernier le Conseil de révision siégeait au chef lieu de notre canton. Une grande animation régnait dans toutes les rues, dans les auberges et même dans les maisons particulières où de parents et amis se trouvaient réunis.
Tous les fonctionnaires du canton étaient venus saluer M. le Préfet qui fait sa première tournée dans le département (…)
M. le Préfet les a remerciés de cet empressement qu’ils ont mis à venir le saluer à son passage, et les a encouragés à être plus que jamais les hommes d’affaires des populations qui continueront ainsi à aimer et acclamer la République. « Suivez, leur a-t-il dit, la voie que vous trace votre excellent Conseiller général, l’honorable M. Rouvière et vous aurez ainsi la certitude de marcher avec sûreté dans le droit chemin. »
La journée s’est terminée avec des espérances de pluie, qui ne se sont pas démenties, il a plu, et s’il plait à Dieu, toutes nos récoltes ne seront pas perdues.
29 avril 1894 – Le Bleymard – Nomination
Par décret du 07 avril 1894, M. Ferrand (Paul-Louis-Joseph) a été nommé notaire à la résidence du Bleymard, et, en cette qualité, a prêté serment à l’audience du 24 courant.
16 juin 1895 – Canton du Bleymard – Tentative d’assassinat
Le 12 juin 1895, à deux heures du matin, une tentative d’assassinat et un vol d’une somme de 403 francs ont été commis entre les Salces et le Baraques de Saint-Hélène par les nommés Martin (Marius), cambusier et Tallet (Gustave) domestique sur la personne du nommé Dalbin (Jean-Joseph), maçon et bûcheron au 2ᵉ lot de la ligne de chemin de fer en construction, en pension chez le sieur Clanaud, cambusier aux Baraques de Sainte-Hélène.
Ndr : Le cambusier était la personne chargée des vivres d’une équipe.
09 février 1895 – Le Bleymard – Conférence agricole
Dimanche dernier, 22 septembre, M. Rigaux, professeur départemental d’agriculture, était chez nous. Il a fait une conférence sur les prairies naturelles et artificielles. Grâce au bienveillant concours de M. le Maire, l’assistance était assez nombreuse.
Le conférencier a développé son sujet avec une simplicité et une grâce parfaites. Aussi les auditeurs se sont-ils promis de revenir plus nombreux encore l’année prochaine.
09 février 1896 – Le Bleymard – Tirage au sort
Lundi 3 courant, avait lieu chez nous le tirage au sort. Le temps était splendide. Aussi les jeunes conscrits paraissaient-ils encore plus gais que d’habitude.
Ajoutons que, même après boire, la plus franche cordialité n’a cessé de régner entre les jeunes gens des diverses communes.
Ndr : Le tirage au sort était destiné à désigner les conscrits dispensés du service militaire (ils avaient tiré « le bon numéro », disait-on). Les plus fortunés, malheureux au tirage au sort, se faisaient remplacer contre espèces sonnantes et trébuchantes par ceux qui avaient tiré le « bon numéro ».
17, 24 et 31 mai 1896 – Le Bleymard – Dialogue « ouvert »
Les élections municipales ont fait l’objet d’un échange de lettres ouvertes publiées dans Le Moniteur et Le Courrier :
17 mai 1896 – Lettre de M. Rouvière
M. Rouvière, notaire, nous prie d’insérer la lettre ci-après qu’il a adressée au Courrier de la Lozère.
Bleymard, le 12 mai 1896.
Monsieur le Directeur du journal Le Courrier de la Lozère (Mende),
Je vous prie et vous requiers au besoin, d’insérer dans votre plus prochain numéro, la réponse suivante à l’article paru le dix mai dans votre journal.
À toutes les insinuations de votre correspondant anonyme je donne le démenti le plus formel, et ce ne sera pas M. Ferrand, chef du parti réactionnaire, qui me contredira puisque, interpellé sur cet article dans la salle de la mairie, il en a reconnu publiquement la fausseté.
J’avais fait préparer des bulletins portant des noms des onze conseillers sortants.
M. Ferrand avait, la veille du scrutin, déclaré qu’il se présentait seul pour remplacer le conseiller décédé, M. Médard*.
À cet effet, il avait lui-même, en visitant toutes les maisons de la commune remis à chaque électeur un bulletin ne portant que son nom. Il m’avait affirmé à moi-même qu’il ne présentait pas de liste en opposition avec celle de l’ancien conseil. Dans ces conditions, j’avais cru devoir garder la neutralité la plus complète, mais je n’avais pris, ainsi que M. Ferrand l’a reconnu publiquement, aucun engagement en sa faveur.
Contrairement à ses assertions, M. Ferrand avait lui-même, concurremment avec ses agents (ses protégés et ses protecteurs), distribué des bulletins portant à la suite de son nom celui de dix candidats (les trois anciens conseillers réactionnaires Buisson, Randon et Sicard, et sept nouveaux).
Si quelqu’un a manqué à sa parole, c’est donc le chef de la liste réactionnaire.
Dans le scrutin du 10 mai, MM. Fabre, médecin, Randon, Blanc et Amouroux, candidats réactionnaires ont tous échoué.
Ce résultat peut laisser des doutes sur l’échec qu’auraient subi les quatre candidats réactionnaires (et non cinq comme s’en vante à tort M. Ferrand), élus au premier tour si les manœuvres que je viens de signaler avaient pu être prévues.
Votre correspondant s‘est un peu trop hâté de chanter victoire.
Il en sera quitte pour sa chanson péniblement élaborée.
Qu’il me permette, en terminant, de lui donner un conseil.
Lorsque vous voudrez combattre une candidature renoncez à la calomnie, à l’injure et à ces insinuations qui vous sont familières : N’ayez pas recours aux articles du journal Le Courrier et surtout ne les faites pas lire et commenter devant la porte des églises, dans les cafés et sur les places publiques par un personnage qui ne peut plus vous soutenir par son vote, serait-il de l’entourage de votre chef de liste.
Recevez, Monsieur le Directeur, mes salutations,
Rouvière,
Maire, Conseiller général.
*Hippolyte Victor Medard
24 mai 1896 – Réponse de M. Ferrand
Ainsi que nous nous y sommes engagés dimanche dernier nous faisons droit à la requête de M. Ferrand et publions in extenso la réponse à la lettre de M. Rouvière parue dans notre numéro du 17 courant.
Bleymard, le 21 mai 1896
Monsieur le Directeur,
Je vous prie, et vous requiers au besoin, de vouloir bien insérer dans votre prochain numéro, la protestation suivante contre la lettre de M. Rouvière du 17 mai courant.
Sous prétexte de répondre à un article anonyme du Courrier de la Lozère, M. Rouvière ne trouve rien de mieux que de se servir de mon nom pour se disculper et justifier sa conduite.
Puisque je suis personnellement visé j’ai le droit et le devoir, non de m’expliquer sur un article dont je ne suis ni l’auteur ni l’inspirateur, mais de rétablir la vérité en ce qui me concerne.
M. Rouvière prétend avoir obtenu de ma part un assentiment complet à tous ses dires et un démenti formel à l’article du Courrier.
C’est en parti inexact.
M. Rouvière m’a seulement demandé si oui ou non il avait été convenu entre nous de former une liste unique sur laquelle nous serions l’un et l’autre portés.
Aucun engagement n’ayant été pris à ce sujet, je ne pouvais que lui donner raison ; mais là seulement n’était pas le nœud de la question ; il est d’autres points délicats, bien plus sérieux qu’il est indispensable de mettre en lumière pour établir nettement les responsabilités.
J’estimais pour mon compte que nos braves paysans, qui n’ont de grossier que leur habit de bure, étaient assez intelligents pour choisir eux-mêmes douze citoyens capables de gérer les intérêts communaux.
Dans ce but, je me contentai de remettre à chacun d’eux un bulletin portant seulement mon nom.
Je n’ai constitué définitivement une liste qu’après l’apparition constatée d’une liste Rouvière composée non seulement des 11 conseillers sortants mais de quinze noms, parmi lesquels le mien n’était pas compris, bien entendu. Pourquoi quinze au lieu de douze ? Je laisse au lecteur le soin de qualifier ce procédé.
Je n’ai mis ma liste en circulation qu’après avoir acquis la certitude que la liste Rouvière était distribuée par notre secrétaire de mairie qui n’est autre que le fils Rouvière lui-même, lequel ignorait sans doute que ses fonctions l’obligeaient légalement à s’abstenir de toute propagande.
Je n’ai rayé le nom de M. Rouvière (que nous avions eu le tort de porter sur notre liste, lui donnant ainsi la faible majorité de vingt voix dont l’ont honoré les électeurs), qu’après une nouvelle manœuvre, celle-ci plus déloyale : on venait de rayer de toutes les listes Rouvière le nom de trois conseillers sortants des plus honorables de la localité, et cela tandis que M. le Maire lui-même exhibait avec ostentation dans la salle de vote sa liste de 11 conseillers sortants sans rature aucune.
Le but de ce procédé n’échappe à personne ; au public d‘apprécier la conduite de M. Rouvière en cette circonstance.
N’est-il pas évident, que si quelqu’un a manqué à sa parole ce n’est pas le chef de la liste Ferrand mais bien le chef de la liste Rouvière : de laquelle ont été déloyalement rayés les trois membres qui faisaient l’honneur du conseil municipal, deux d’entre eux depuis déjà trente ans.
On croit nous avoir prouvé par le deuxième tour de scrutin que le pays n’est pas pour nous. Erreur profonde ! Nos adversaires savent à quoi s’en tenir, ils l’ont implicitement avoué par les manœuvres sans nombre qu’ils ont cru nécessaires à leur succès.
La délicatesse m’impose à ce sujet une réserve absolue. Je me contenterai de répéter mais bien haut que la belle minorité qui nous a été accordée de 57, 66, 66 et 70 voix contre 75, 78, 85 et 87 n’est point, pour qui sait lire et comprendre, une défaite honteuse comme l’affirme votre journal Le Moniteur, mais bien une victoire pour moi et mes amis, qui se fiant sur leur honorabilité n’ont fait que peu ou point de démarches.
Je trouve enfin M. Rouvière, bien empressé de nous donner une épithète politique, attendu que mes amis et moi n’avons jamais fait aucune déclaration publique, nous restons donc absolument libres et indépendants.
En ce qui concerne La Croix et Le Courrier, il me plait quoique n’étant nullement visé, de déclarer à M. Rouvière que je suis un fidèle abonné et un lecteur assidu de ces deux feuilles, et, malgré cela, n’en déplaise à M. le Maire je crois être un aussi bon citoyen et aussi honnête qu’il peut l’être lui-même.
En terminant je me permettrai de souhaiter à M. Rouvière que la parole que je lui adressais publiquement naguère ne vienne point traverser quelques uns de ses rêves dorés et les changer en cauchemar. Vous êtes sûr maintenant, Monsieur, d’avoir tous les suffrages, y compris le mien voire même le vôtre, mais sachez bien que vous n’êtes pas sûr d’avoir l’unanimité des sentiments.
Je lui souhaite aussi que le beau sapin, planté, sur sa demande, contrairement aux habitudes et usages établis ne se transforme pas au prochain scrutin en un saule pleureur.
Recevez M. le Directeur mes salutations,
Ferrand, Conseiller Municipal.
31 mai 1896 – Réplique de M. Rouvière
M. E. Rouvière, qui a lu la réponse de M. Ferrand dans Le Courrier lui consacre une deuxième lettre qu’il adresse à notre confrère et qu’il nous prie d’insérer.
Bleymard, le 27 mai 1896
Monsieur le Directeur,
Dans le numéro de votre journal du 24 courant, vous publiez une lettre adressée au Moniteur de la Lozère, par M. Ferrand, conseiller municipal du Bleymard.
Cette lettre nécessite de ma part la réponse suivante, que vous vous ferez, j’en suis convaincu, un devoir d’insérer dans votre plus prochain numéro.
M. Ferrand accepte le démenti donné par moi à l’article paru le 10 mai dans Le Courrier de la Lozère, et sa lettre, malgré ses réticences, est loin d’infirmer de que j’avais écrit sur le agissements du parti réactionnaire dans le scrutin du 03 mai.
Je ne m’arrêterai pas à réfuter à nouveau les allégations mensongères de M. Ferrand.
On voit qu’il écrit plutôt pour les étrangers que pour les habitants de la commune du Bleymard.
On sait pertinemment, en effet, que sa liste était déjà distribuée avant qu’un seul bulletin ait été remis ou distribué par mes amis politiques.
Il est également incontestable que, si trois anciens conseillers municipaux, (dont je suis loin de suspecter l’honorabilité), portés sur les listes préparées par moi, ont été plus tard rayés sur ces listes et leurs noms remplacés par ceux d’autres trois candidats, c’est parce qu’ils figuraient sur la liste Ferrand.
Nous en avons été avisés malheureusement trop tard.
M. Ferrand, pour expliquer l’échec de ses candidats au second tour de scrutin, parle de manœuvres sans nombre. – Quand on se permet des affirmations pareilles, on cite des faits à l’appui.
Ses candidats n’auraient pas fait de démarches !
Quel nom donnez-vous donc, M. Ferrand, au fait de visiter plusieurs fois, vous et vos amis, toutes les maisons de la commune et de mettre en mouvement, pour recommander votre liste, tous les agents et soutiens bien connus de la réaction ? Vous me reprochez de vous donner à vous et à vos amis une épithète politique.
Mais, qu’êtes-vous donc, si vous n’êtes pas réactionnaire ?
L’épithète de conservateur ou de monarchiste vous irait-elle mieux ? Pour moi, elles sont synonymes.
Osez déclarer publiquement que vous ne l’êtes pas et ne vous contentez pas de dire que vous êtes libre et indépendant. Dans le parti républicain, nous le sommes tous.
Serions-nous destinés à vous voir, dans ce temps de conversions politiques, prendre l’étiquette de Républicain indépendant ? Mais vous ne le ferez pas, ce serait un comble, et vos protecteurs bien connus vous renieraient.
J’arrive à la partie de votre lettre qui a trait à ma réélection, comme Maire, à l’unanimité des suffrages.
Vous auriez bien dû ne pas en parler et ne pas m’obliger à vous répondre sur ce point.
Avant le premier tour de scrutin, afin d’obtenir les suffrages de mes amis, vous aviez soin de leur déclarer que vous ne désiriez qu’une chose, être élu conseiller municipal, et que vous ne visiez pas la mairie. Cette tactique vous a réussi.
Lors du second tour, vous croyant sûr de votre succès, vous faites publier partout, confirmant en cela les articles parus dans Le Courrier le 10 mai, que votre élection comme Maire était certaine.
Vous ne me contredirez pas sur ce point, car M. Ferrand, votre père, en commentant ces journaux, disait publiquement, devant l’église de Saint-Jean-du-Bleymard, le dimanche matin, avant l’ouverture du scrutin, que vous ne visiez pas la mairie.
Pour les admettre sur votre liste, vous exigiez des candidats l’engagement de voter pour vous lors des élections du Maire, ainsi que M. Fabre, médecin, l’un d’eux, le disait à qui voulait l’entendre, non seulement dans la commune du Bleymard, mais dans les communes voisines, affirmant que mon règne de Maire était fini et que votre élection était assurée.
Dans ces conditions, vous auriez dû avoir au moins la pudeur de voter pour vous.
Quand on se porte chef de liste, on n’abdique pas au dernier moment.
Dans votre parti vous pouvez appeler cela du courage, dans le parti Républicain on le qualifie de lâcheté.
En m’accordant votre suffrage vous auriez fait réserve de vos sentiments. Cela ne s’explique guère ; dans tous les cas, les seuls sentiments auxquels j’attache de l’importance, sont ceux de mes amis politiques.
Vous parlez d’un sapin planté à cause de ma réélection de Maire. Mais à qui croyez-vous en imposer en disant que c’est sur ma demande ? Le public a voulu protester par cette manifestation contre les agissements du parti réactionnaire et les articles publiés dans le journal Le Courrier.
Je n’ai pas eu besoin, vous le savez, de provoquer cette manifestation. Pourriez-vous en dire autant ?
Serait-il vrai que, si, comme conseiller municipal, un bel arbre n’est pas encore planté au devant de votre maison, c’est que vos partisans, après s’être minutieusement comptés, ne se seraient pas trouvés en nombre suffisant pour rendre visite à la forêt du Champ ?
Il n’en a pas été ainsi pour moi, vous avez pu vous en convaincre de visu, le lundi soir, lorsque dans la maison B… vous assistiez à l’arrivée de l’arbre. Les précautions que vous aviez prises pour cacher vos traits n’ont pas été suffisantes : tout le monde, en effet, vous a reconnu. Une autre fois pour qu’il n’en soit pas ainsi, ayez soin de vous recouvrir le visage de votre cagoule de pénitent.
Un mot pour finir, M. Ferrand nous donne rendez-vous aux élection prochaines : je l’accepte de grand cœur. Ce jour-là le parti républicain prouvera, j’en suis sûr, que la commune du Bleymard, quoiqu’on fasse, n’est pas encore acquise à la réaction.
Recevez, Monsieur le Directeur, mes salutations.
E. Rouvière, Maire.
12 juillet 1896 – Le Bleymard – Incendie
Lundi 06 juillet, un violent incendie a dévoré entièrement la maison d’habitation de M. Barrandon, ex-huissier au Bleymard.
Le feu s’est déclaré au moment où la famille était absente de sorte qu’il a fallu enfoncer les portes pour pénétrer dans la maison.
L’incendie a pris dans les combles et s’est propagé avec une telle rapidité, qu’à l’exception de quelques meubles du rez-de-chaussée, rien n’a pu être sauvé. L’on est parvenu pourtant à préserver les maisons voisines.
Les dégâts s’élèvent à 22 000 fr. environ et sont couverts par une assurance de la Compagnie La Providence.
Aucun accident de personnes.
02 août 1896 – Le Bleymard – M. Monestier
Notre affectionné conseiller général M. Rouvière, vice-président de l’Assemblée départementale, nous a présenté M. Monestier, qui répond bien à l’élogieuse description qu’il nous en avait été faite. Autour de lui se groupent bien des sympathies ?
Si jadis nous eûmes le tort de ne pas accumuler nos suffrages sur M. l’ingénieur Léon Boyer et de le laisser aller mourir à Panama, M. Monestier, qui fut doublement son collègue et l’ami, peut être certain que nous ne commettrons pas la même faute dans l’importance actuelle.
Qu’il en soit partout comme ici, et son succès sera particulièrement caractéristique.
Un lecteur.
09 août 1896 – Le Bleymard – Accident
Mercredi, un orage d’une violence inouïe a ravagé les champs et causé un lamentable accident.
Un enfant, le jeune Peytavin (Jean-Baptiste), était dans un champ conduisant deux bœufs, lorsqu’il fut frappé par la foudre. Après l’orage, son père, ne le voyant pas revenir, alla à sa rencontre et le trouva au milieu du champ, foudroyé, la face contre terre.
Les deux bœufs, qui avaient été renversés, n’ont pas eu d’autre mal.
20 décembre 1896 – Le Bleymard – Visite de M. Monestier, subvention
Notre sympathique sénateur, M. Monestier était de passage au Bleymard, le jeudi 10 courant. Les délégués sénatoriaux du canton sont venus en grand nombre le saluer et l’assurer de tout leur dévouement. Vous avez raison de le dire, la réélection de nos deux sénateurs est assurée à une grande majorité.
Grâce aux actives démarches de notre excellent maire, M. Rouvière, il vient d’être accordé à notre commune la somme de 18 000 fr. pour la construction d’un hôpital hospice.
Au nom des pauvres et des malheureux, nous lui disons merci.
Ndr : L’hôpital sera construit et le bâtiment abritera, plus tard, le « cours complémentaire » puis la mairie.
31 janvier 1897 – Le Bleymard – La Morve
Le 18 courant, M. Gaillard Frédéric, roulier* au Bleymard, conduisait un cheval à la foire d’Alais. Mais, ayant été l’objet d’un examen par un vétérinaire de cette ville, l’animal fut reconnu comme offrant des symptômes de morve.
Gaillard dut évacuer immédiatement l’animal et le conduire chez lui pour y observer les prescriptions de nos règlements sanitaires.
Samedi dernier, l’animal était soumis à l’examen de M. Troupel, vétérinaire à Mende, qui prescrivit la séquestration de l’animal et sa mise en observation pendant deux mois.
Le propriétaire a préféré s’en débarrasser et l’a fait abattre. La gendarmerie du Bleymard a veillé à ce que l’enfouissement du cadavre et la désinfection de l’écurie soient faits conformément à la loi.
*Le roulier désignait le transporteur de personnes ou de marchandises (voiturier).
31 janvier 1897 – Le Bleymard – Tirage au sort.
C’est vendredi dernier, 22 courant, qu’a eu lieu le tirage au sort. Les jeunes conscrits paraissaient aussi gais que d’habitude.
Aux cris traditionnels de « Vive la classe ! » succédait le chant des vieux couplets d’une chanson patriotique ou d’une romance dédiée Au tendre cœur d’une maîtresse…
Que diable, voulez-vous ? On n’a pas tous les jours vingt ans !
27 février 1898 – Canton du Bleymard – Illustre visite
Nous avons reçu au Mas-d’Orcières, la visite de M. Paulin Daudé et, je vous dois, en toute sincérité, l’impression qu’il a laissée chez les quelques personnes auxquelles il en a causé le désagrément.
La première lui déclare net : que, si tous les électeurs de l’arrondissement le connaissaient, « d’un Daudé ils en feraient quatre » (textuel).
L’Etincelant recroqueville ses rayons de fer blanc et s’en va quérir chez le plus proche des compliments de même calibre. De même chez un troisième, enfin chez M. le Maire où il fut fraîchement accueilli dés qu’il eut décliné ses noms et qualités.
Pour se remettre de ses émotions pénibles, M. Daudé s’en fut au cabaret, trinquer avec trois jeune gens, qui firent encore meilleur accueil à la bouteille qu’au candidat, aux frais duquel se firent les libations. Décidément, mon pauvre Paulin, ça se décolle.
24 avril 1898 – Canton du Bleymard – Opinion
Une dizaine de braves paysans parlent élection sur la place publique d’un village.
L’un d’eux, appréciant la candidature de Daudé, s’exprime ainsi :
« Aquesté Daoudé aquos coumo la bachio d’el paouré Untel : La boulet prèn es prèn, la boulet pas prèn, es pas prèn : Lou boulet el réspublicain es respublicain, lou boulet blon es blon. »
Cette réflexion si typique fut saluée d’une hilarité générale.
Dans le même canton, on a découvert, sur ce caméléon politique, toutes les couleurs de l’arc-en-ciel selon le moment et les hommes auxquels il s’adressait.
Ces variations lui portant un préjudice considérable, ses amis devraient lui conseiller de modérer ces manifestations étincelantes de son opinion.
18 décembre 1898 – Le Bleymard – Nos mines
L’administration de la société La Vieille Montagne, vient de donner l’ordre de cesser les travaux aux mines du Mazel. Malgré de longues et coûteuses recherches faites sous la direction intelligente de M. Artous, surveillant des travaux, on n’a découvert que des filons sans importance. C’est une ressource de moins pour notre malheureux pays.
M. et Mme Artous nous ont affirmé qu’ils s’en iraient le cœur gros et tout rempli d’agréables souvenirs. À notre tour nous leur disons : Soyez assurés que vous avez l’estime de tous ceux qui vous connaissent, que vos amis sont nombreux et que votre départ, quoique prévu depuis quelque temps, n’en laissera pas moins, dans l’esprit de nos populations, une trace qui ne s’effacera pas de sitôt.
Ajoutons que M. Artous est un excellent républicain.
Ndr : Les mines seront ensuite exploitées et abandonnées à plusieurs reprises selon la rentabilité des filons et des cours du plomb.
12 mars 1899 – Le Bleymard – Nécrologie
Nos lecteurs connaissent déjà la mort de l’honorable conseiller général du Bleymard.
Dire notre surprise, notre émotion et nos regrets en présence d’une disparition si soudaine nous est impossible.
Certes nous connaissions M. Rouvière pour un travailleur acharné – et il n’est rien qu’un labeur de tous les jours, de tous les instants pour user un homme.
Nous savions aussi que le dévoué conseiller général souffrait, par périodes, de douleurs rhumatismales, mais à le voir toujours droit, toujours allègre, toujours le premier au travail, toujours dévoué à la chose publique et à ses électeurs, qui se serait douté d’une fin si proche ? Qui aurait pu prévoir que l’année 1899 verrait se terminer une existence d’autant plus précieuse que les services passés donnaient une idée des services futurs ?
La mort de M. Rouvière revêt l’aspect d’un deuil public non seulement pour le canton du Bleymard pour lequel il avait une de ces affections, une de ces sollicitudes que l’on peut qualifier de paternelles – mais encore pour le parti républicain tout entier qui lui doit beaucoup, qui l’estimait tant, et qui comptait pour les luttes futures, sur son concours si dévoué, si précieux.
Nous l’avons dit et nous ne saurions trop le répéter, la disparition de M. Rouvière est une grande perte pour le parti républicain, il a droit à tous nos regrets après sa mort, comme il avait, avant, droit à toute notre estime et toutes nos sympathies.
Ces regrets, ces preuves d’attachement, le parti républicain les a donnés à la famille Rouvière dès la fatale nouvelle connue et tout spécialement le jour de ses obsèques.
Tous ceux qui ont eu le cruel avantage d’accompagner à sa dernière demeure la dépouille du regretté conseiller général ; tous ceux qui ont pu voir cette population du Bleymard, du canton, du département à la tête de laquelle marchaient les représentants du Gouvernement en Lozère et les délégations du conseil général, des notables du Cercle Républicain Mendois ; tous ceux qui ont été témoins du recueillement, de la tristesse de cette foule dont les gorges étaient serrées par l’émotion, dont les yeux se sont maintes fois remplis de larmes ; tous ceux-là ont pu se rendre compte du degré de considération dont jouissait M. Rouvière aux yeux de ses concitoyens, du Gouvernement et des républicains de la Lozère.
Quand la disparition d’un homme politique fait se produire d’aussi sympathiques démonstrations, un éloge devient inutile.
Ce qu’a été cet honnête homme, ce travailleur infatigable, ce républicain sincère, les divers orateurs qui lui ont dit le dernier adieu, l’ont exprimé en termes aussi éloquents que justes. Nos lecteurs lirons les discours que M. le Préfet, au nom du gouvernement, que M. Ausset au nom du conseil général, que M. Rouquette au nom des notaires et que M. Joly au nom du Cercle Républicain Mendois, ont prononcé au bord de la tombe, aujourd’hui, hélas, à jamais fermée sur les restes de notre ami. Ils se feront par là une juste idée de la valeur du défunt et du grand vide que sa mort laisse parmi nous.
Il ne nous reste plus qu’à nous tourner vers ceux que cette mort laisse dans le deuil : vers la compagne dévouée de sa vie, vers ses enfants, vers ses autres parents qui tous auront trouvé dans les preuves de sympathie données à la dépouille mortelle du cher absent, un sorte de baume à leur douleur, et les prier de vouloir bien nous permettre de joindre nos regrets à tous ceux déjà exprimés et de les assurer à notre tour de toute notre estime et de toutes nos sympathies.
3. Années 1900
17 janvier 1900 – Le Bleymard – Souscription en faveur des inondés
M. Henri Rouvière, étudiant en médecine à Montpellier, frère du sympathique conseiller général, du Bleymard, à encore recueilli les sommes suivantes en faveur des inondés des communes de Cubières et Cubiérettes :
- MM. Docteur X : 1 franc
- Astuc : 1 franc
- Docteur Malzac : 5 francs
- Teillard-Nozerolles : 2 francs
- Freydier-Paul : 3 francs
D’autre part ont donné pour le même objet :
- MM. Portalier receveur au Bleymard : 2 francs
- Médard Augustin, cafetier : 1 franc
25 juin 1900 – Cubiérettes – Coup de faux mortel
Un bien pénible accident s’est produit le 18 courant aux environs de cette localité. Voici les faits :
Le jeune Reboul (Justin), âgé de 16 ans, était occupé à faucher du regain dans un pré, non loin du village, lorsque survint son frère Jean-Baptiste, novice au pensionnat des frères des écoles chrétiennes d’Avignon et arrivé depuis peu à la ferme paternelle.
Celui-ci pria son frère de le laisser faucher.
Justin y consentit et se mit à l’écart, mais pas suffisamment, car au premier coup de faux, le terrible instrument l’atteignait à la jambe droite et lui faisait une blessure horrible.
Le sang se mit à couler aussitôt en abondance et, malgré les soins qui lui furent prodigués, le malheureux jeune homme expirait 4 heures après l’accident.
09 septembre 1900 – Le Bleymard – La rage
Le samedi 02 courant, un chien étranger de haute taille parcourait notre localité et mordait plusieurs de ses congénères. Soupçonné d’être atteint d’hydrophobie, il fut abattu par les gendarmes. M. le Maire fit venir immédiatement de Mende M. Theret, vétérinaire, qui, après examen, déclara que l’animal en question était bien réellement enragé. Plusieurs chiens du village ayant été mordus, nous prenons nos précautions. Avis aux habitants des communes voisines.
Juin 1901 – Le Bleymard (extraits d’un article caricaturant M. Ferrand, expurgé des propos par trop blessants)
Nous avons plus que de l’espoir nous sommes assurés du succès, M. Ferrand ne sait plus où donner de la tête. (…) Palin l’abandonne pour soutenir M. Monteil. Serai-ce parce que le Docteur Mendois a plus de galette que notre maire et Tabellion ? Toujours est-il que M. Ferrand se rabat sur des cabaleurs de vingtième classe : (…) Et encore ! Depuis quelques jours il erre dans Mende comme une âme en peine. (…) l’aspect général las, très bas ; bientôt suspendu aux basques de Balmebleu – maire ou pas maire de Mende – (…)
Suit un dialogue imaginé entre un Lucas et un Jean Pierre :
« (…) Tu sais si je suis dévoué à notre ami commun, et pourtant je dois t’avouer franchement… les choses prennent une tournure tout à fait inquiétante (…) Nos agents démoralisés ne se gênent pas pour dire que nous serons battus à plate couture (…) D’ailleurs tu n’as pas oublié qu’aux municipales M. Rouvière est arrivé bon premier (…) »
Il ne faut jamais dire qu’on perd courage !
1ᵉʳ juillet 1901 – Le Bleymard – Au correspondant de La Croix
Il est joli votre article ! Il continue la série des « larges accrocs à la vérité » que vous servez ici abondamment aux électeurs du Bleymard quand il est fait appel à leurs suffrages.
Je ne m’arrêterai pas sur les quarante deux premières lignes de votre tartine ? Toutefois, quoique vous en disiez, les travaux du tunnel du Château du Tournel, les grands pas qu’ont fait en avant les projets de route de Chazeaux à Belvezet, de Belvezet au Bleymard, de Chazeaux à Langogne, de Chasseradès au Bleymard, les travaux déjà ouverts à Cubiérettes et dans la commune de Cubières, ceux qu’on est sur le point d’y faire au premier jour, témoignent et sans qu’il soit besoin de commentaires que notre sympathique conseiller général a soutenu vaillamment les intérêts de son canton.
Mais il faut que vous ayez une sérieuse dose d’énergie pour mettre en jeu dans vos deux dernières lignes (les seules intéressantes à mon point de vue) l’intelligence et l’activité de notre conseiller général « Le fils fera-t-il mieux que le Père » dites-vous. Il fera aussi bien c’est-à-dire pour le mieux, il l’a déjà prouvé.
Quant à son intelligence et à ses activités, je suis prêt, si vous le désirez, à les mettre en parallèle avec celles de son concurrent.
Je suppose que notre conseiller général, qui est licencié en droit vaut bien, intellectuellement, le citoyen Ferrand avec son brevet de capacité.
J’ai même entendu dire qu’il existait certains documents très authentiques qui prouvent qu’à l’antique époque où le citoyen candidat Ferrand se faisait breveter, on ne faisait guère attention aux fautes de français et… (je vous dis ça bien bas, dans le tuyau de l’oreille) aux grosses fautes d’orthographe.
Juillet 1901 – Le Bleymard – Cimourdain* et son fétiche (extraits)
M. Cimourdain est un homme très chatouilleux (…) mais sa colère devient terrible lorsqu’on touche à sa chère idole, M. Ferrand (…) M. Cimourdain a été tour à tour clérical, anticlérical, républicain, radical, socialiste, monarchiste, etc. Actuellement il est ferrandiste… mais attendons la fin. (…)
Lundi dernier, divers groupes de jeunes gens venus fêter le succès du candidat républicain, parcouraient les rues du Bleymard en chantant la Marseillaise. (…) se conformant aux ordres reçus, les manifestants ne disaient rien qui put blesser M. Ferrand (…)
Cimourdain vint à passer et profite de l’occasion pour montrer qu’il était fort en gueule et se met à crier à pleins poumons « Vive M. Ferrand » et à proférer des injures grossières à l’adresse de M. Rouvière. Les choses se seraient gâtées sans l’intervention opportune des gendarmes.
Croyez moi M. Ferrand : Mieux vaut un sage ennemi qu’un ami… ignorant.
*Qui était ce M. Cimourdain ?
17 février 1902 – Le Bleymard – Tentative de suicide
Lundi dernier, vers 8h du soir, un certain Migonney, dit Comtois, résidant à Villefort, a, dans un accès de délire alcoolique, tenté de se donner la mort à l’aide d’un couteau de poche. Voici quelques détails :
Migonney est, parait il un alcoolique invétéré. Depuis la mort de sa femme survenue en avril dernier, Comtois donnait des signes non équivoques de dérangement cérébral. Il était, comme tous les grands buveurs d’absinthe, atteint de la manie de la persécution.
Donc, lundi soir, après avoir bu une bonne partie de la journée, le pauvre diable se mit à parcourir les rues du Bleymard en gesticulant et en tenant des propos incohérents. C’est sur la route du Bleymard à la Remise qu’il s’est frappé au ventre et à la poitrine de cinq coups de couteau. Relevé, évanoui, il a été transporté à Mende et admis d’urgence à l’hospice. Son état est considéré comme très grave.
06 juillet 1902 – Le Bleymard – Succès
Nous apprenons que M. Henri Rouvière, frère du sympathique conseiller général du canton, vient de subir avec le plus grand succès et avec éloges de la part du jury, l’examen de professorat en médecine. Nous voyons là le couronnement de solides études, l’affirmation de très nombreuses aptitudes et de belles qualités en même temps que le présage d’un brillant avenir. Nos félicitations à M. Henri Rouvière.
13 juillet 1902 – Le Bleymard – Accident
Mardi dernier 08 courant, le nommé Vidal surveillant des mines, descendait du chef lieu, se rendant au poste indiqué de la journée. Ayant lancé sa bicyclette à toute vitesse sa machine vint heurter au contour du pont du Lot, à 40 mètres de l’hôtel Reboul de la Remise. Le contre coup jeta le bicycliste à bas sur un tas de pierres. Certaines personnes, témoins de cette terrible chute, accoururent aussitôt, le relevèrent presque mort, couvert de sang qui coulait à flots de plusieurs blessures, et le transportèrent à son domicile.
Les médecins n’ont pu encore se prononcer sur son sort.
Espérons toutefois et souhaitons que sa robuste constitution triomphera de cette terrible secousse.
Février 1903 – Le Bleymard – Accident
Jeudi dernier, les ouvriers mineurs Robert et Bataille, allumaient un coup de mine dans lequel ils avaient placé deux cartouches de dynamite. Après s’être mis à l’abri pour écouter si le coup partait, ils sortirent de la galerie et allèrent déjeuner.
Une heure après, ils sont de retour au chantier. Ils constatent que la mine n’a produit aucun effet et, pensant que ce raté était dû à une fissure du rocher, se mettent en devoir de creuser le trou plus profondément. Malheureusement, par un hasard difficile à expliquer, une des cartouches n’avait pas éclaté. On devine ce qui se passe alors. Le premier coup de masse provoque une explosion formidable, les pierres volent en éclats, les deux malheureux sont renversés et l’un d’eux affreusement mutilé.
Aux cris poussés par les victimes leurs camarades accourent en toute hâte. Ils trouvent le pauvre Bataille à demi mort, les habits en lambeaux, la tête pleine de sang et la main droite complètement broyée.
On l’a transporté immédiatement dans sa famille. On peut juger du désespoir de sa femme et de ses cinq enfants.
Enfin il a été admis d’urgence à l’hôpital de Mende.
Quant à son camarade il en sera quitte pour la peur et quelques égratignures sans gravité.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 15 février 1903 – Le Bleymard – Accident terrible.
23 février 1903 – Le Bleymard – Incendie
Mardi dernier, 17 courant, vers quatre heures et demie du matin, les habitants du Bleymard étaient réveillés par les cloches qui sonnaient à toute volée. En ce moment les ouvriers mineurs qui arrivaient du travail, parcouraient les rues en criant « Au secours ! Au feu ! Au feu ! ». En un clin d’œil tout le monde est sur pied et on apprend que l’hôtel Reboul (de la Remise) brûle. On court sur les lieux mais il est trop tard, le bâtiment principal n’est plus qu’un vaste brasier.
Les habitants de la maison ont été réveillés juste à temps. M. Lafond, percepteur, sa femme et son petit n’ont été sauvés qu’à grand peine et grâce à M. Gauzy cordonnier et Chanard surveillant des mines.
Mme Reboul, son fils et sa plus jeune fillette, M. Reynard, ingénieur des mines, se sont sauvés presque nus.
On ignore les causes de l’incendie. Les dégâts sont considérables mais couverts par diverses assurances.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 22 février 1903 – Le Bleymard – Incendie.
23 octobre 1904 – Le Bleymard – Égarée
La semaine dernière, la femme G…, bonne vieille de 80 ans, partie pour aller cueillir des branches mortes, ne rentrait pas la nuit venue.
Inquiets ses enfants informèrent aussitôt la gendarmerie qui, secondée par quelques personnes de bonne volonté, fit des recherches, une bonne partie de la nuit mais sans succès.
Le lendemain on se remit en campagne et l’on finit par découvrir la vieille femme à Belvezet chez un habitant qui lui avait offert l’hospitalité.
On comprend ce qui s’était passé. En retournant chez elle, son fagot de bois sur le dos, la pauvre femme avait tourné au sens contraire et s’était rendue à Belvezet en croyant aller au Bleymard.
À son âge elle est excusable.
19 mars 1907 – Le Bleymard – Conférence populaire (extraits)
Dimanche dernier, 12 mars, M. Poux, professeur au collège de Mende, a fait une conférence sur La Russie Populaire et sociale. Ce sujet, bien d’actualité avait attiré plus de 150 personnes.
Dès le début M.Poux (…) a montré les différences notables qui existent entre la Russie et les autres nations européennes. Au point de vue politique les Russes ne possèdent aucune de nos grandes libertés. (…) Au point de vue social, nombreuses et suggestives différences que nous n’énumérerons pas. Qu’il nous suffise de dire que le conférencier a su captiver ses auditeurs en dressant un tableau frappant de la situation misérable des moujiks ou paysans Russes.
L’état politique de la Russie, la guerre Russo-Japonaise, telles sont les causes de la révolution actuelle. Les revendications du peuple Russe sont justes et sa voix saura se faire entendre.
M. Poux termine en espérant que grâce à ses explications les auditeurs pourront dorénavant lire les journaux avec plus d’intérêt et surtout plus de fruits.
L’auditoire charmé, couvre ces dernières paroles d’un tonnerre d’applaudissements.
La conférence a été précédée et suivie d’une audition de morceaux se musique exécutés par un phonographe apporté par M. Poux (…)
Nous remercions vivement M. Poux ainsi que le comité d’organisation des conférences populaires.
16 juin 1907 – Le Bleymard – Un maire admirable (extraits)
Trop heureux les contribuables du Bleymard, s’ils connaissaient leur bonheur ! Ne sont-ils pas merveilleusement administrés par le plus admirable des maires ? Ah ! ce n’est pas du maire du Bleymard que l’on dira jamais qu’il n’a pas, de ses contribuables, le souci le plus vif ! Qu’on écoute plutôt :
Lundi 03 juin, M. le Contrôleur arrivait au Bleymard pour procéder aux mutations et recevoir les réclamations des contribuables. M. le Maire avait été avisé en temps utile. Pourtant M. le Contrôleur ne trouva personne a qui parler. Mais où donc était le maire ? Il avait filé dare-dare vers la capitale Mendoise. M. le Maire a d’autres soucis plus pressants que celui des intérêts de ses administrés. Et les répartiteurs, où étaient-ils ? M. le maire avait oublié de les convoquer. Quel homme que M. le Maire du Bleymard et comme il comprend à merveille les devoirs de sa fonction !
Pourtant un remord cuisant tortura quelques minutes la conscience administrative de M. le Maire. Que vont penser de mon sans gène les habitants du Bleymard ? Que vont-ils penser d’un maire qui oublie leurs intérêts ? Et il télégraphia presto ces quelques mots laconiques dignes d’un général « Renvoyez réunion demain ». Les ordres du général ne furent pas exécutés.
Oui, le mardi, M. le Maire se croyait avoir l’esprit plus libre pour songer aux intérêts des contribuables. Dame ! Le dimanche ses idées avaient été bouleversées par les braves habitants de Chasseradès. Pour les remettre en équilibre un petit voyage à Mende avait paru nécessaire à M. le Maire du Bleymard.
Est-ce que les contribuables comptent aux yeux de M. le Maire quand ses idées sont troublées et son esprit déconcerté ?
Quel admirable administrateur tout de même que M. le Maire du Bleymard !
07 juillet 1907 – Le Bleymard (extraits)
J’ai encore reçu une communication relative au retard apporté par M. Ferrand dans le mandatement des pensions aux vieillards et aux infirmes nécessiteux, prévues par la loi.
« Pourquoi donc, me demandent mes correspondants, M. Ferrand refuse-t-il d’accomplir les formalités qui permettraient à quelques indigents de toucher les sommes si modestes que leur accorde la loi ? »
Pour la troisième fois, je réponds : M. Ferrand se moque des formalités indiquées par la loi, comme de sa première culotte (…) Dans la répartition des secours, il a si bien fait à sa tête, que l’Administration ne peut approuver une délibération qui viole effrontément toutes les prescriptions légales et foule aux pieds les règles les plus élémentaires de l’équité. (…)
M. Ferrand ne parvient pas à comprendre qu’en voulant embêter ses adversaires, il réussit du même coup à sacrifier les intérêts de ses amis. Ceux-ci pas plus que ceux-là ne peuvent toucher, par la maladresse stupéfiante du maire les sommes qui leur reviennent. Quel ami !
21 juillet 1907 – Le Bleymard – M. Ferrand candidat (extraits)
(…) En ce moment, M. Ferrand fatigue sa puissante cervelle à composer de grands, très grands discours. Si les vieillards et les infirmes du Bleymard n’ont pas leur mandat, ils auront, en revanche, le plaisir délicat de goûter à l’éloquence de M. Ferrand. Et ça nourrit, l’éloquence !!
Vrai ! Les citoyens du Bleymard auraient grand tort de ne pas voter pour un candidat qui va servir aux malheureux des plats d’éloquence ! (…)
Voulez-vous parier un liard contre un centime que M. Ferrand parlera avec des larmes dans la voix, de son amour pour les malheureux, de sa tendresse pour les humbles ?
Topez-là, mes amis !
Elle est belle tout de même la tendresse de M. Ferrand ! Oh oui ! Il est magnifique son amour pour les malheureux !
25 septembre 1907 – Le Bleymard – Vol de dynamite
À proximité du village de Saint-Jean-du-Bleymard on a découvert, dans un mur, 80 cartouches de dynamite qui provenaient sûrement d’un vol commis au préjudice de la Cie des Mines du Bleymard. Une information est ouverte.
28 juin 1908 – Cubiérettes – Fugitif retrouvé
Le Moniteur a relaté (?) la disparition du jeune Simon Reboul, âgé de 16 ans.
Le cadavre du pauvre garçon a été découvert, le 15 courant, dans un ruisseau, auprès du village de Sarrejols, à dix kilomètres du Pont-de-Montvert.
L’avant-veille deux jeunes bergers l’avaient aperçu, encore en vie. Mais au lieu de lui porter secours ils s’enfuirent, pris de peur, et commirent l’imprudence de ne pas en parler, tout de suite, à leurs parents. Lorsqu’ils le firent, ceux-ci coururent sur les lieux mais c’était trop tard. Simon Reboul était mort depuis quelques heures.
Ses restes furent transportés à Cubiérettes où a eu lieu l’inhumation.
25 août 1908 – Le Bleymard – Au conseil général
Le Conseil Général a adopté le vœu suivant, présenté par M. Rouvière qui deux fois de suite a été victime de la mauvaise volonté ou des manœuvres, plus ou moins avouables de la Commission cantonale de recensement des votes :
Le Conseil général émet le vœu que des sanctions pénales soient ajoutées aux dispositions légales conférant au Président du chef lieu de canton, le droit de recensement des votes en matière d’élections cantonales et de proclamation de l’élu, pour le cas où le président s’oublierait jusqu’à commettre des irrégularités ou des abus susceptibles d’altérer les résultats des opérations et de nuire aux droits de l’un des candidats.
04 juillet 1909 – Le Bleymard – Élections au conseil général
Les électeurs du canton du Bleymard sont convoqués pour, le 11 juillet prochain, à l’effet d’élire leur conseiller général.
Deux candidats, toujours les mêmes : M. Rouvière, républicain et M. Ferrand, réactionnaire.
C’est pour la troisième fois, dans l’espace de deux ans, que cette élection se renouvelle !
Espérons que les républicains sauront comprendre et accomplir tout leur devoir en votant pour le seul candidat qui puisse défendre leurs intérêts régionaux auprès des pouvoirs publics.
Espérons aussi que, cette fois, le Conseil d’Etat ne trouvera rien à redire au verdict du suffrage universel.
25 juillet 1909 – Saint-Jean-du-Bleymard – Nécrologie
Samedi dernier, 17 juillet, quelques amis accompagnaient à sa dernière demeure M. Camille Peytavin, mort à l’âge de trente deux ans et inhumé dans le tombeau de sa famille à Saint-Jean.
Ce jeune homme, à peine de retour de l’Indochine, où il était conducteur des Ponts et Chaussées, a succombé aux atteintes de ces terribles maladies des pays chauds, fléaux qui déciment ces courageux français qui n’hésitent pas à se sacrifier pour aller répandre notre civilisation dans nos lointaines colonies.
Nous adressons à M. Peytavin, père du défunt, ancien ingénieur, secrétaire de notre illustre compatriote, M. Léon Boyer, ainsi qu’à toute sa famille l’expression de nos plus sincères condoléances.
26 septembre 1909 – Le Bleymard – Accident
Dimanche soir le nommé François Nègre, dit le Tailluret, ouvrier de M. Bastide, entrepreneur aux Mines du Mazel, rentrait au Bleymard pour reprendre son travail le lendemain, de retour de Mende où il avait été passer la journée du dimanche au milieu de sa famille, et se couchait dans la chambre qu’il occupait avec plusieurs camarades.
Lundi, de grand matin on trouvait l’infortuné baignant dans son sang, et ne donnant plus signe de vie, étendu sur le pavé de la rue.
On suppose que, voulant satisfaire un besoin naturel pendant la nuit, le malheureux se penchant par une lucarne, perdit l’équilibre et, tombant de cette hauteur, passa de vie à trépas sans pousser le moindre cri.
Le corps a été ramené à Mende lundi soir et ses obsèques ont eu lieu mercredi.
Ndr : À cette époque les maisons étaient dépourvues de « commodités » et certains hommes ne se privaient pas, la nuit, de satisfaire leur besoin naturel par la fenêtre de leur chambre.
21 novembre 1909 – Cubières – La pouliche fidèle
M. Rocher Henri, propriétaire aux Alpiers, commune de Cubières, vend à la foire du 02 novembre à Mende une pouliche qu’il avait nourrie.
Il n’y pensait déjà plus, lorsque le surlendemain, il voyait, à sa grande surprise, arriver l’animal au village et s’en allait prendre son ancienne place à l’écurie.
Inutile de dire que l’honnête cultivateur tient la pouliche à la disposition de l’acquéreur, dont il ignore le nom et l’adresse.
Ndr : C’était l’époque où, à l’issue des négociations le marché se concluait, en se tapant dans la main, par un, « pachio fachio » et extraction de billets de banque du volumineux portefeuille de l’acheteur (pas de facture… confiance !)
27 mars 1909 – Le Bleymard – Manifestation républicaine
Dimanche 20 mars le citoyen Paraf, de passage au Bleymard, a été l’objet d’une manifestation spontanée et enthousiaste.
À cinq heures et demie les membres du comité républicain, réunis à l’hôtel Teissier, vont se séparer lorsque notre candidat arrive à l’improviste, reconnu de loin grâce au drapeau tricolore que porte sa voiture. (…)
La nouvelle de son arrivée vite répandue, amène à l’hôtel Teissier tout le Bleymard républicain. (…)
Le bureau constitué sur le champ comprend : Buisson, rentier, président, Galière, maire et Rouvière, notaire, assesseur, Salles, secrétaire.
La parole est donnée au candidat qui dit ce qu’il compte faire pour améliorer la condition du paysan et de l’ouvrier.
Il est amené à parler de ses adversaires politiques, qui de Piou le je m’en t… à Daudé, le froussard, n’ont rien fait pour notre pauvre Lozère.
Quant à la religion, il la respecte mais, il méprise ceux qui exploitent le sentiment religieux pour satisfaire leurs appétits.
En un mot : respect de toutes les croyances sincères, sollicitude pour le peuple ; retraites ouvrières et paysannes ; impôt sur le revenu ; telles sont les principales déclarations qui soulèvent les applaudissements de plus de cent électeurs (…)
Le moment du départ venu, la foule fait la haie au candidat, et, c’est aux accents de la Marseillaise et aux cris de « Vive la république ! Vive Paraf ! » que notre sympathique ami nous quitte.
4. Années 1910
30 mars 1910 – Le Bleymard – M. Paraf
Mardi c’était jour de foire. Une épaisse couche de neige couvrait le pays depuis deux jours et rendait fort difficile toute communication. Aussi la foire n’a pu être tenue.
Quelques hommes seulement, étaient venus malgré la neige et causaient avec animation dans les cafés. Ils causaient surtout politique : la présence de M. Paraf au Bleymard en était sans doute cause… Le candidat républicain avait tenu à faire connaissance avec les habitants de notre localité. Comme ailleurs, il a été reçu avec une parfaite amabilité, même chez quelques réactionnaires des plus notoires.
12 juin 1910 – Le Bleymard – La guerre à la laïque
Cette guerre inaugurée par la fameuse lettre des évêques, est loin d’être terminée en Lozère ou du moins dans les cantons du Bleymard et de Villefort.
L’institutrice du Mas, en sait quelque chose. Elle a vu pénétrer une bande de fanatiques dans sa salle de classe, tout bousculer et lacérer un livre mis à l’index par nos épiscopes.
De tels actes révoltent les consciences et appellent une sanction pénale. Des plaintes ont été portées à qui de droit. Des enquêtes ont eu lieu. Les honnêtes gens attendent les résultats avec impatience.
18 septembre 1910 – Cubières – Vendanges
Après plusieurs jours de joyeux préparatifs 50 personnes de la section de Pomaret, sont parties, dimanche 11 septembre à destination de diverses localités vignobles du Gard et de L’Hérault pour faire la cueillette des raisins.
Cette année, l’augmentation du prix du vin a eu une répercussion sur leur salaire journalier. Les hommes gagnent 5 francs par jour, les femmes et les enfants 2 francs 50.
Ces vendangeurs se sont mis en route avec joie.
Espérons que tous, après trois semaines de pénible labeur, reviendront en bonne santé, apportant à leurs familles de quoi les mettre à l’abri du besoin durant les mauvais jours de l’hiver.
23 octobre 1910 – Saint-Julien-du-Tournel – Alumettes
Samedi dernier, deux bonnes femmes du village d’Auriac revenaient du marché de Mende où, entre autres emplettes, elles avaient fait leur petite provision d’allumettes de contrebande*, 14 paquets chacune, enfermés dans leurs paniers.
En chemin elles rencontrèrent les gendarmes qui sentirent les allumettes prohibées et les confisquèrent. C’est un avertissement pour ceux qui croient avoir profit à faire usage de ces sortes d’allumettes.
*Nda : Le monopole de l’État sur la fabrication et la vente des allumettes est institué par la loi du 02 août 1872, supprimé le 04 décembre 1972. Des dealers à Auriac, qui l’eût cru !
09 avril 1911 – Le Bleymard – Incendie
Lundi, un important incendie a détruit le matériel servant au lavage du minerai des mines de zinc, plomb et autres matériaux connexes, du Bleymard.
La construction, toute en bois imprégné de carbonyle, a offert une proie particulièrement facile aux flammes. Aussi rien n’a pu être sauvé, ni des immeubles ni des machines qu’ils contenaient.
Les dégâts sont évalués à plus de 100 000 francs, et sont couverts par une assurance.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 16 avril 1911 – Le Bleymard – Mines.
09 octobre 1911 – Le Bleymard – Terrible accident de bicyclette
Dimanche dernier, M. de Las Cases était venu donner une conférence dans notre localité.
Toute la cléricaillerie de la région s’était empressée de venir écouter la parole évangélique de ce sénateur, digne de porter la soutane. Parmi l’auditoire, comme toujours d’ailleurs, beaucoup de curés. L’on nous affirme que les applaudissements furent nombreux et qu’on s’égosilla à crier sur tous les tons : « Vive M. de Las Cases ! Vive M. le Sénateur ! », si bien que les gosiers s’échauffèrent et, qu’à la fin de la conférence, il fallut les arroser.
La joie fut bientôt générale, mais de courte durée.
L’on apprenait sous peu, en effet, que M. l’abbé Jaffuel, vicaire à Altier, en retournant chez lui à bicyclette, avait fait une chute terrible au pont du Lot, et se trouvait dans un état lamentable. Transporté au Bleymard, le malheureux abbé y a reçu les soins du Dr Masseguin, mais en vain puisque, au dernier moment, nous apprenions qu’il aurait succombé à ses affreuses blessures.
Tout en plaignant l’infortuné vicaire, nous ne pouvons que constater qu’il aurait mieux fait de rester à dire ses vêpres dans sa paroisse, que de venir au Bleymard écouter les histoires à dormir debout de M. De Las Cases.
Ndr : Ce fait est relaté plus brièvement dans La Croix, il n’évoque pas la mort de l’abbé mais, seulement, la gravité de son état : La Croix – 1ᵉʳ octobre 1911 – Le Bleymard – Accident de bicyclette.
1ᵉʳ septembre 1912 – Le Bleymard – Aux mines
Jeudi soir, les rouleurs quittèrent le travail pour protester contre l’application d’amendes encourues pour insuffisance de travail. Ils se plaignent, aussi, des exigences excessives des surveillants. Les mineurs et laveurs se solidarisant avec leurs camarades ont quitté également le travail, et la grève a été déclarée.
Vendredi, seuls les fours continuaient à fonctionner.
Une réunion du syndicat a eu lieu, dimanche, à l’hôtel André. Plusieurs mineurs y prirent la parole et prêchèrent la résistance dans le calme. À l’unanimité il fut décidé qu’aucune concession ne serait faite au sujet des revendications présentées à la direction : suppression des amendes, retour à l’ancien état des choses concernant les sorties des ouvriers de l’intérieur.
Quinze gendarmes sont en permanence à la mine.
Le transport est suspendu. M. Carpentier, administrateur-délégué, est arrivé. Il ne veut, dit-on, ne faire aucune concession. Aucun ouvrier n’a repris le travail. La grève se poursuit et le conflit semble s’aggraver. Espérons, toutefois, qu’une entente surgira de la prochaine entrevue des délégués ouvriers et des administrateurs.
08 septembre 1912 – Le Bleymard – Aux mines (suite)
La grève est virtuellement terminée. Les travaux ayant été temporairement suspendus, le règlement général et définitif eut lieu samedi dernier 31 août.
Lundi, une cinquantaine d’ouvriers se sont présentés à la direction pour être réembauchés.
Conformément à la décision du conseil d’administration de la Société, les ouvriers des fours et des lavoirs ont reçu la promesse formelle d’emploi, et certains même, ont repris le travail.
Seuls les ouvriers de l’intérieur n’ont pas repris, la décision du Conseil d’administration ne les satisfaisant pas, et craignant qu’un choix soit fait parmi eux dont quelques uns seraient les victimes.
Jeudi les rentrées étaient de 90, beaucoup d’ouvriers ayant quitté le pays pour aller vendanger.
Les gendarmes qui étaient en permanence à la mine doivent être rappelés dans leurs brigades, aujourd’hui, vendredi.
Nous espérons et comptons bien que tout le personnel sera repris, dans l’intérêt commun de la société des mines et des ouvriers.
13 juillet 1913 – Orcières – Suicide d’un berger
Le cadavre du sieur Diet, berger à Serviès commune du Mas-d’Orcières, ayant été découvert dans un bois et les premières constatations ayant permis de conclure à une mort violente, le Parquet de Mende se transporta, lundi sur les lieux aux fins d’autopsie et d’enquête.
Il en est résulté que toute idée de crime doit être écartée et que l’on se trouve en présence d’un suicide. Cette opinion résulte surtout de ceci : La mort de Diet a été occasionnée par une balle de revolver qui, tirée à bout portant dans la région abdominale, est allée se loger dans l’épine dorsale. Or les habits ne portent aucune trace de brûlure ou de déchirure.
On en déduit que Diet entrouvrit son gilet et sa chemise, appliqua le canon du revolver sur la peau et, le coup parti, quoique grièvement blessé, il eut le courage de se revêtir et d’aller mourir à quelque distance, dans le bois où son cadavre a été découvert. L’on n’a pas en effet découvert l’arme qui lui a permis de mettre son funeste projet à exécution.
Les mobiles de cet acte de désespoir sont inconnus.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 13 juillet 1911 – Le Bleymard – Trouvé mort.
10 août 1913 – Le Bleymard – Remerciements de M. Rouvière
Chers amis,
Je viens vous remercier de la confiance que vous m’avez témoignée dimanche dernier et vous dire que tous mes efforts vont tendre à m’en rendre digne et reconnaissant.
Par vos votes vous avez hautement proclamé vos principes républicains, vous avez déclaré que vous voulez marcher avec l’énorme majorité des français, et vous avez manifesté votre désir formel de voir notre canton utilement représenté et vos intérêts personnels, utilement défendus auprès des pouvoirs publics.
Les promesses que j’ai faites, je les tiendrai.
La ligne de conduite que vous m’avez tracée, je la suivrai.
Le drapeau que vous m’avez confié, je le défendrai.
Auprès du Gouvernement, je serai votre représentant tenace et, grâce à mes amis, votre avocat heureux.
Maintenant, à l’œuvre pour le canton du Bleymard et pour la République,
Votre dévoué concitoyen,
Félix Rouvière, Maire du Bleymard, Conseiller Général.
22 février 1914 – Le Bleymard – Accidents
Lundi 16 février, M. Salanson, ouvrier mineur, manœuvrant sur un plan incliné, fut renversé par un wagon vide qui roula sur lui et lui fit de graves contusions au bas ventre. Le blessé fut transporté, d’urgence à l’hôpital de Mende.
Le même jour, sur la route du Bleymard au Mazel, une jument, effrayée par une bicyclette fit un écart, et sauta sous la route, entraînant dans sa chute, la voiture, dont l’essieu fut brisé, et les voyageurs qui roulèrent sur une pente très raide. Le conducteur se releva indemne, mais son compagnon, un vieillard de 78 ans, eut plusieurs côtes brisées.
Cet accident est dû à l’étroitesse de la route dont l’élargissement est demandé depuis longtemps.
15 mars 1914 – Le Bleymard – Conseil de révision
Les opérations du conseil de révision eurent lieu le vendredi 06 mars sous la présidence de M. Pugeault, préfet de la Lozère.
Le nombre de conscrits, portés sur les tableaux de recensement, était de 83, dont 73 de la classe 1914. 56 conscrits, seulement, se présentèrent devant la commission. Sur le nombre 49 furent reconnus bons pour le service armé et un seul fut versé dans le service auxiliaire.
05 juillet 1914 – Le Bleymard – Trouvée morte
Mme veuve Ferrier, née Tabusse, qui vivait seule, a été trouvée morte, samedi matin, sur le parquet de sa cuisine. Elle était âgée de 76 ans.
07 juillet 1914 – Le Bleymard – Un enfant qui l’échappe belle
Un enfant de 4 ans, fils de M. Urbain Rocher, des Alpiers a failli trouver la mort dans les circonstances suivantes.
Il accompagnait son père qui transportait des pierres sur un char attelé de quatre bœufs. Ayant passé devant l’attelage en marche, l’enfant fut bousculé et roula sous les pieds des animaux. N’ayant aucun mal, il tentait de sortir de cette dangereuse position, lorsque son père, affolé, se mit à pousser des cris. Effrayés, les bœufs avancèrent brusquement, et une roue du char passa sur le corps du pauvre petit. Les personnes accourues ne croyaient relever qu’un cadavre, elles furent agréablement surprises en constatant que l’enfant, bien que fort meurtri, n’avait rien de brisé. Le docteur qui lui a prodigué ses soins compte bien le sauver.
À compter du mois d’août 1914 il n’y a plus de rubrique locale, le journal se consacrant à la relation des opérations militaires.
5. Années 1920
28 juillet 1920 – Le Bleymard – Nos amis
Nous apprenons avec le plus vif plaisir le succès de M. Arzalier à l’examen du baccalauréat, 2ᵉ partie.
M. Arzalier, après avoir été mobilisé et fait campagne au Maroc, avait été mis en sursis pour préparer son examen. Il rejoindra maintenant son corps pour compléter la durée de son service militaire, comme le fils aîné de notre excellent ami, M. Arzalier, directeur de notre école publique de garçons, qui a lui-même, pendant quatre ans de guerre, servi la Patrie.
Au fils et au père nous adressons nos plus sincères félicitations.
28 décembre 1920 – Cubières – Une fugue
Il n’est bruit que du départ mystérieux de notre vicaire. Le jeune abbé s’est envolé, un de ces derniers jours vers les cinq heures du matin après avoir déposé, à la dérobée, chez le maire, la clé de la mairie et celle de son logement personnel. Son départ a coïncidé avec celui d’une jeune fille de 26 ans et l’on est sûr qu’ils ont volé de conserve sur l’île enchantée des Amours.
La population toute entière est consternée car le galant abbé jouissait de l’estime et de la confiance publiques.
Ce n’est pas nous qui le blâmerons d’une détermination qui l’honore. Il a eu, en effet, le courage de son amour.
« Que ceux qui n’ont jamais péché lui jettent la première pierre. »
03 janvier 1921 – Cubières – Où sont-ils ?
C’est la question qu’on se pose avec une certaine angoisse. Généralement on admet que le galant vicaire avait méthodiquement préparé son départ et s’était assuré une place ou un emploi quelque part, en lieu sûr et tranquille. Le couple ne s’était pas, d’ailleurs, embarqué sans biscuits. La donzelle avait garni son portefeuille d’une dizaine de billets de mille francs et l’amoureux en soutane avait poussé l’astuce jusqu’à se faire prêter, la veille du départ, mille francs par une bonne femme qui peut devenir sa parente.
Et dire qu’il aurait trouvé, à Cubières, au moins trente personnes qui lui auraient très volontiers prêté chacune pareille somme. Brrr !
Ce jeune abbé est un honnête homme : il n’a pas abusé de la situation. Véritable coq du village, il s’est contenté d’une poulette aux ailes dorées et il l’épouse.
Homme de confiance de la commune, il n’avait qu’à faire une démarche, un signe pour vider de leurs économies courantes au moins trente familles et il tape simplement de mille francs sa future parente.
C’est un honnête homme, un gentil petit abbé que Belvezt et son maire regrettent toujours d’avoir laissé partir.
03 avril 1921 – Cubières – La fin d’une idylle
L’histoire amoureuse de notre jeune ecclésiastique vient de finir. La colombe est rentrée, ces jours-ci, au nid paternel, un peu fatiguée – un peu beaucoup – d’un long voyage au pays des Amours. Tu parles ?
Quant au tourtereau, il a été reçu, les bras ouverts par l’Église maternelle et moyennant une pénitence, dont nous ignorons la durée, dans une Trappe austère, il pourra reprendre l’exercice de son ministère… dans un autre département.
Il lui a été beaucoup pardonné parce que, au regard de l’Église, il a beaucoup péché.
Et cela est parfait de miséricorde.
Abélard, en pareil cas, s’en tira à moins bon compte. Il est vrai qu’Abélard vivait au Moyen-Âge.
La Croix devra avouer que la révolution a eu du bon, même pour les prêtres.
05 juin 1921 – Le Bleymard – Nos jeunes compatriotes
Nous avons appris avec plaisir le succès, au concours de surnumérariat des contributions directes, de M. Arzalier, fils de notre excellent ami. M. Arzalier, directeur de l’école publique des garçons du Bleymard.
Nous adressons au père et au fils nos plus affectueuses félicitations.
26 juin 1921 – Le Bleymard – Accident aux mines
Dans la matinée du lundi 20 courant, deux ouvriers étaient occupés à forger un fleuret de perforateur pneumatique, lorsque tout à coup se produisit une violente explosion, projetant de multiples fragments dans le corps des deux malheureux forgerons.
Par quel hasard malheureux, par quel bizarre moyen, de quelle extraordinaire façon, un explosif s’était-il logé dans la masse de cette barre d’acier ?
Mystère !
Toujours est-il que, quelques instants plus tard, le médecin du Bleymard et M. Meneteau, le dévoué ingénieur, accompagnaient les deux victimes à l’hôpital de Mende.
Dans le service important de chirurgie, que dirige avec un zèle inlassable le docteur Cabaniols, les sinistrés firent aussitôt l’objet d’un examen détaillé et de soins particulièrement délicats.
Folcher Jules de Saint-Jean-du-Bleymard, âgé de 20 ans, est atteint de plaies pénétrantes du thorax avec fracture de plusieurs côtes. Telle une blessure par éclat d’obus ou de grenade.
Gilles Emile du Mazel, âgé de 12 ans, est atteint de plaie pénétrante du rachis, de gros délabrements thoraciques et de fracture de plusieurs doigts.
La double situation est grave.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 10 juillet 1921 – Le Bleymard – Accident.
13 novembre 1921 – Le Bleymard – Décès de M. Castan
Nous avons appris avec le plus profond regret la mort de M. Castan, instituteur public au Mazel, commune du Mas-d’Orcières depuis de longues années.
Agé de 52 ans, M. Castan avait été mobilisé dans un régiment territorial, puis dans la gendarmerie pendant que son fils était dans les tranchées.
C’était un maître consciencieux et un loyal républicain.
Nous adressons à sa veuve, à son fils actuellement instituteur à Saint-Julien-du-Tournel ainsi qu’à toute sa famille nos plus cordiales condoléances.
23 avril 1922 – Le Bleymard – Carnet blanc
Nous sommes heureux d’annoncer le mariage, fixé au 29 avril, de M. Peytavin (Ernest) du Bonnetès avec Mlle. Bonnefoi (Augustine) du Bleymard.
Nous adressons aux futurs époux, nos meilleurs vœux de bonheur.
14 mai 1922 – Le Bleymard – Conseil d’arrondissement
Les meilleures nouvelles nous arrivent de tous les points de ce canton.
M. Peytavin Cyprien, qui est la sympathie faite homme, reçoit le meilleur accueil. La courtoisie de sa campagne est fort remarquée.
Aussi, La Croix fait la bête, elle feint d’ignorer sa candidature.
Le 14 mai, M. Peytavin Cyprien, lui montrera qu’il est un peu là !
21 mai 1922 – Le Bleymard – Conseil d’arrondissement
M. Bringer a donné ici à plein collier. C’est son canton. Un échec l’aurait atteint personnellement et diminué.
À la foire du 09 mai au Bleymard, le vin coula à faire marcher les moulins, le tabac fuma à obscurcir le soleil.
N’empêche que les résultats d’ensemble sont très encourageants et qu’une bonne organisation des républicains, commune par commune, aura, d’ici peu, d’excellents résultats.
08 août 1922 – Le Bleymard – Navigation maritime
Parmi tous les élèves bénéficiaires de bourses, ou fractions de bourses, dans les écoles nationales de navigation maritime de Marseille, nous relevons le nom de notre compatriote Massador, fils de M. Massador, instituteur au Bleymard, père de cinq enfants mineurs.
14 janvier 1923 – Le Bleymard – Que signifie cette affiche ?
Nous avons lu avec surprise, l’affiche coléreuse de M. Bringer. Sommes nous donc en période électorale, que signifie cette affiche ?
Veut-on nous donner le change en nous intéressant à des querelles personnelles qui ne nous regardent pas afin de taire ce qui nous regarde ?
Lorsque notre député inaugure un genre de publicité, il fera bien de nous faire connaître par voie d’affiche, son action parlementaire à la Chambre et au Conseil général. Il nous dira aussi ce qu’il a fait pour le département et en particulier pour notre canton qu’il devait transformer. Qu’il se hâte, sinon, l’an prochain, nous lui dirons ce qu’on dit chez nous : « Passaras disaté qué las brayos saroou prestos, y manquo pas qué lous boutous ».
Un groupe d’électeurs.
17 juillet 1923 – Le Bleymard – Certificat d’études
Candidats admis :
- Le Bleymard : Robert Louis, Diet Marie
- Saint-Jean : Pigeyre Félix, Paulet Augustine, Privat Rosalie
- Bonnetès : Buisson Marie-Antoinette, Buisson Marthe
- Le Mazel : Carrier Raymond, Diet Jules, Castor Marie
- Les Alpiers : Vincent Marie
- Orcières : Peytavin Celestin, Beys Marie-Louise, Bresson Marie, Doladille André
05 août 1923 – Le Bleymard – Fête votive du 15 août
Programme :
- mardi 14
- à 21 heure : retraite aux flambeaux avec musique
- mercredi 15
- à 06 heures : réveil en fanfare
- à 08 heures : distribution de gâteaux
- à 10 heures : ouverture du tir aux coqs, lapins et canards
- à 13 heures, jeux divers : loto, casse-cruches, poêle et ficelle, une surprise est réservée aux concurrents
- à 15 heure : ouverture du bal, une superbe ombrelle sera offerte à la demoiselle qui ouvrira le bal ; grande bataille de confettis
- à 17 heures, course à bicyclette (16 km), 4 prix
- à 17h30, course à pied : 3 prix
- à 21 heures : brillant feu d’artifice, reprise du bal
Un bon accueil est réservé aux étrangers*.
*Ndr : par « étranger » comprendre les habitants de Bagnols, Altier, Chasseradès, etc. et bien entendu, les « buveurs d’air ».
12 août 1923 – Mas-d’Orcières – Le mal du plomb
Un certain nombre d’ouvriers travaillant à la mine sont, de temps à autre, saisis d’une sorte de paralysie qui leur enlève l’usage des mains et même des bras. Cette infirmité provient, incontestablement, du maniement du minerai de plomb.
Mais comme les dispositions légales et réglementaires en la matière, n’énoncent pas le cas dont nous parlons, les compagnies d’assurances ne se reconnaîtraient pas responsables de ces accidents graves. Cependant ils proviennent manifestement du travail et il nous paraît impossible que les pouvoirs publics, en indiquant les cas, aient voulu établir une liste limitative.
L’admission de ces infirmes comme accidentés du travail est commandée par l’humanité et la logique.
Nous avons foi dans la justice des pouvoirs publics pour combler cette lacune inhumaine.
19 avril 1925 – Le Bleymard – Nos compatriotes
Nous lisons, dans Le Journal Officiel, la nomination suivante « Le titre de professeur sans chaire est conféré à partir du 1ᵉʳ avril 1925 à M. Rouvière, agrégé près la faculté de médecine de Paris. »
Nous sommes heureux, à cette occasion, d’adresser à M. le professeur Rouvière nos très sincères félicitations pour ce titre universitaire si bien mérité par ses travaux scientifiques et son talent tout spécial d’enseigner l’anatomie.
14 juin 1925 – Le Bleymard – Succès
Nous enregistrons avec plaisir le succès du jeune Alphonse Flamme, reçu définitivement aux examens de commis-titulaire à la Banque de France.
Ce compatriote est le petit-fils de M. Alphonse Flamme, suppléant à la justice de paix, décédé au Bleymard il y a 6 ans et le neveu de M. Emile Flamme, boulanger, décédé à Ispagnac, il y a un an et demi.
Nous nous réjouissons avec la famille du jeune Alphonse et nous lui adressons nos meilleurs compliments.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 14 juin 1925 – Le Bleymard – Un beau succès.
02 janvier 1927 – Chasseradès – Prix de vertu
Sur la liste des lauréats du prix de vertu, nous relevons, avec plaisir, le nom de Teissier Victoria de notre commune.
Cette brave fille obtient en effet, un prix de 1 000 francs de la fondation Marie Lasne.
C’est que, depuis de longues années, l’amour filial chez Victoria Teissier a été soumis à rude épreuve.
Son père depuis longtemps aveugle, est tombé perclus de jambes, et, le voilà depuis deux ans immobilisé dans son lit, avec ses 90 ans sonnés.
De plus sa mère, âgée de 80 ans a vu, elle-même, s’affaiblir toutes ses facultés physiques et morales pour retomber en état d’enfance et devenir ainsi une deuxième charge pour notre héroïne, presque sans ressources.
Et cependant, amis lecteurs, vous pouvez voir Victoria Teissier, dissimulant courageusement ses peines et ses fatigues, toujours alerte, s’efforçant même de sourire entre… deux larmes !
Honneur et courage à cette brave enfant !
17 avril 1927 – Le Bleymard – Adjudication
Le dimanche, 24 avril 1927, à la mairie du Bleymard, il sera procédé, à l’adjudication au rabais, des travaux à faire pour la construction d’un égout collecteur et le pavage* de la rue principale du chef lieu de la commune.
Le montant total des travaux s’élève à la somme de 40 119 francs 25. Le cautionnement est de 1 200 francs.
*Ndr : Les « calades » ont été enlevées, après la guerre, et la rue goudronnée, malgré les réticences des paysans qui craignaient que les vaches dérapent sur le goudron (un certain nombre d’écuries étaient situées dans la rue Principale (Le Mouonti, Le Frégade, Le Marcur, Le Madagascard…)
1ᵉʳ janvier 1928 – Le Bleymard – Arbre de Noël
Le lundi 26 décembre, la société des mines du Bleymard offrait un arbre de Noël aux enfants des écoles dont les parents appartiennent au personnel de la mine.
Cette petite fête est réussie en tous points. Une centaine* d’enfants se pressaient à l’heure indiquée dans la salle de la cantine de la mine, trop petite pour recevoir les parents. L’arbre de Noël illuminé, les enfants du Mazel, sous la conduite de leur dévouée institutrice, Mme Bros, chantèrent un air de circonstance « Mon beau sapin ». Puis on offrit une collation aux enfants et la distribution des jouets eut lieu au milieu des rires et des cris de joie.
À 15h30, tout le monde se retirait, emportant la promesse que pareille fête se déroulerait tous les ans.
À toutes le dames qui ont bien voulu préparer cette petite fête nous adressons nos sincères félicitations et nos remerciements.
Mais il convient d’indiquer aussi que l’initiative revient au représentant de la Société des mines du Bleymard, M. Gallon**, directeur, et qu’en la circonstance nous devons tout particulièrement adresser l’hommage de notre reconnaissance à Mme Gallon dont le dévouement et le large désintéressement ont assuré la réussite de cette gentille réunion, qu’elle présidait, d’ailleurs, avec tant de grâce et de charmante amabilité.
*Ndr : On croit rêver !
**Il est vrai que M. Gallon jouissait, de la part unanime des ouvriers et de la population, d’une très grande estime en raison de ses compétences et de ses grandes qualités humaines.
22 juillet 1928 – Le Mas-d’Orcières – Libéralité
Comme en 1927, la Société des Mines du Bleymard, à l’occasion du premier janvier, a fait don d’une somme de 1 000 fr. à l’école du Mazel.
Cette somme servira à enrichir la bibliothèque scolaire, créée avec les dons de la Société en 1927, à augmenter le matériel scientifique, à embellir la salle de classe, en un mot à procurer aux élèves du Mazel, tous fils de mineurs, un peu plus de joie, d’hygiène et de bien être.
Au nom des élèves et de leurs parents, je souligne avec plaisir ce geste généreux et j’adresse nos plus chaleureux remerciements à M. Gallon le sympathique et si dévoué directeur de la Société des Mines du Bleymard. (un ami de l’école)
27 juin 1928 – Saint-Jean-du-Bleymard – Fête votive
Samedi 23 juin à 21 heures, retraite aux flambeaux.
Dimanche 24 juin, réveil en fanfare, etc.* Bon accueil aux étrangers.
*Ndr : Même programme que pour la fête votive du Bleymard.
26 mai 1929 – Le Bleymard – Élections de la municipalité
Le nouveau conseil municipal s’est réuni pour procéder à la nomination du maire et de l’adjoint.
M. Rouvière, maire sortant a été élu à l’unanimité. M. Peytavin, adjoint sortant, a été élu par 11 voix et 1 bulletin blanc. M. le maire remercie les conseillers municipaux de la nouvelle preuve de confiance qu’ils viennent de lui témoigner et les assure que tous ses efforts et son activité seraient apportés à l’œuvre municipale, persuadé qu’il aura en eux des collaborateurs dévoués aux intérêts de la commune.
08 septembre 1929 – Le Bleymard – Incendie
Un incendie, d’une rare violence, a éclaté, lundi soir, dans la grange de M. Chevalier du Mazel-les Mines. La porte du chenil étant ouverte, le feu se propagea dans tout le bâtiment, menaçant les immeubles voisins appartenant au fermier Augade et à la maison Richard.
Alerte donnée, les ouvriers des mines, travailleurs des champs, habitants du Mazel et du Bleymard accoururent : La pompe à incendie de la Société des Mines fut mise en action et, fonctionnant sans relâche jusqu’à minuit, permit de circonscrire le feu.
Seule la grange fut la proie des flammes, mais le dégâts sont considérables.
Les bâtiments sont couverts par une assurance. Malheureusement, le fermier Augade n’avait pas assuré ses récoltes et il subit de ce fait, une perte de près de 40 000 francs.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 08 septembre 1929 – Le Bleymard – Incendie.
29 décembre 1929 – Le Bleymard – Syndicat d’électrification de la région du Bleymard (extraits)
La bonne situation financière du Syndicat a permis de procéder au tirage au sort des 14 obligations qui doivent être amorties en 1930 et sans faire appel à la garantie des communes intéressées sont sorties au tirage les obligations portant les numéros : (…)
Les titulaires de ces titres peuvent se les faire rembourser à dater du 1ᵉʳ janvier 1930 par M. le Percepteur du Bleymard, trésorier du Syndicat.
Le nombre d’usagers ne faisant qu’augmenter, les recettes du Syndicat ne peuvent que progresser. Il y a donc lieu d’espérer que l’emprunt sera amorti dans un délai moindre que prévu.
Nous avons la satisfaction d’annoncer l’électrification des écarts, c’est-à-dire des hameaux et maisons isolées, ne jouissant pas encore de l’électricité. Le comité espère que M. Blanc, ingénieur, voudra bien continuer à faire tout son possible pour donner, au plus tôt, satisfaction aux populations intéressées.
Pour faire face aux dépenses de réalisation de ce projet, il sera fait un nouvel emprunt Syndical.
Aujourd’hui, dans les communes syndiquées on connaît les avantages de l’électricité et l’on sait que les sommes souscrites constituent un placement des plus sérieux et exempt de risques. Le Comité du Syndicat a la ferme conviction que le futur emprunt sera réalisé sans la moindre difficulté et que personne n’hésitera à souscrire les sommes qui seront demandées pour chaque agglomération à électrifier. La réalisation du projet est à ce prix.
Le comité du syndicat.
6. Années 1930
06 janvier 1930 – Le Bleymard – Soirée récréative
Les classes des écoles publiques du Bleymard et de Saint-Jean, réunies à l’école le 24 au soir, sous la présidence de M. Le Maire, ont donné une Charmante soirée récréative. La foule des parents et amis de l’école publique venue pour applaudir les enfants s’est divertie, trois heures durant. Chants, monologues et saynètes ont tous été bien exécutés. La Gévaudanaise de M. Massabuau a eu un grand succès.
Un bel arbre illuminé, était chargé de jouets destinés à récompenser les jeunes acteurs. Une tombola, aux nombreux cadeaux, tous très beaux, clôtura cette soirée.
À tous les amis de l’école, venus si nombreux, à tous les généreux donateurs, merci.
16 février 1930 – Le Bleymard – Nos nemrods
Dimanche dernier, la battue aux sangliers organisée par nos vaillants chasseurs fut couronnée de succès.
Un magnifique pachyderme tomba, non sans une lutte homérique sous les coups de fusil de l’habile chasseur qu’est notre sympathique percepteur. Nous disons lutte homérique car s’en fut une : il ne fallut pas moins de six coups de fusil pour mettre à mort ce sanglier qui était décidé à vendre chèrement sa peau. Malheureusement pour lui, le sort le mit en présence d’un chasseur, qui malgré qu’il fût seul, grâce à son calme et à son sang froid, sut sortir vainqueur de la lutte.
En attendant d’autres trophées cynégétiques, toutes nos félicitations à nos braves chasseurs.
27 avril 1930 – Le Bleymard – Avertissement d’enquête
L’administration des Télégraphes va faire procéder à l’établissement d’une ligne électrique dans la commune du Bleymard.
Le tracé de cette ligne indiquant les propriétés privées où doivent être placés les supports, restera pendant trois jours consécutifs à partir du 26 avril 1930, déposé à la mairie de la commune du Bleymard où les intéressés pourront en prendre connaissance et présenter leurs observations et réclamations.
20 avril 1931 – Le Bleymard – Nécrologie
Lundi un cortège imposant et recueilli accompagnait au champ de repos la dépouille de M. Vialle Jean, ouvrier mineur, décédé à l’hospice de Mende des suites d’une longue et implacable maladie.
Le défunt, âgé de 45 ans seulement fut prisonnier de guerre et dut contracter, dans les camps de concentration, le mal qui l’emporta.
Il laisse une belle famille de cinq enfants dont deux sont encore en bas âge.
Les ouvriers mineurs tenant à rendre un dernier hommage à leur camarade assistèrent très nombreux à ses obsèques et déposèrent pieusement, une belle couronne sur sa tombe.
M. Vialle laisse le souvenir d’un homme affable et paisible et emporte les regrets unanimes de ceux qui l’ont fréquenté.
À sa veuve, à ses enfants si cruellement éprouvés, nous adressons nos bien sincères condoléances.
22 novembre 1931 – Le Bleymard
M. Bringer Louis, député Conseiller général du Bleymard, est l’un des seize membres de l’assemblée départementale qui ont osé faire rémunérer par les contribuables les services électoraux de M. François Bon, maire de Balsièges.
17 avril 1932 – Le Bleymard – Visite de M. Parrain
Dimanche dernier, nous avons eu le plaisir de recevoir la visite de M. Parrain, candidat républicain. Il n’était pas inconnu pour nous son dévouement, sa serviabilité ont été plusieurs fois appréciés par nos compatriotes. Le Bleymard, qui est républicain, donnera certainement la majorité à M. Parrain.
Le mardi, jour de foire, il est revenu parmi nous pour prendre contact avec un très grand nombre d’électeurs.
24 avril 1932 – Saint-Julien-du-Tournel
Grande a été la surprise des habitants du Feljas, de Malmont, de Sauvage et du Tournel quand ils ont appris que M. le Préfet de la Lozère avait supprimé le bureau de vote qui se tenait d’habitude, au Feljas.
Pourquoi les obliger, le 1ᵉʳ mai, à aller déposer leur vote au chef lieu de la commune, alors qu’ils votaient toujours au Feljas ?
Pourquoi supprimer ce seul bureau de vote quand sont maintenus tous ceux qui étaient d’ordinaire crées à chaque élection pour faciliter le vote des électeurs ?
Des bureaux sont maintenus dans des hameaux qui sont plus rapprochés du chef lieu de leur commune que le Feljas ne l’est de Saint-Julien ?
M. le Préfet ne connaît pas encore les chemins et les escarpements du Feljas pas plus que ceux de beaucoup d’autres communes.
Il faut que quelqu’un l’ait induit en erreur sur la commune de Saint-Julien quand il prit l’arrêté du 09 avril. Oui mais qui ? Et qui avait intérêt à cette suppression ? C’est ce que se demandent les habitants du Feljas, de Malmont, de Sauvage et du Tournel.
19 mars 1933 – Le Bleymard – Anciens Combattants
Les A.C. du Bleymard se sont réunis en assemblée constitutive et ont adhéré à la Fédération Lozérienne des Associations de Mutilés, Réformés, Veuves de Guerre et A.C.
M. Duplan et le Dr Morel, délégués du bureau de cette fédération, ont exposé clairement la nécessité du maintien des droits acquis par les Victimes de la Guerre et démontré la nécessité d’une collaboration constante entre ces dernières.
Le Conseil d’Administration a été composé de la façon suivante :
Professeur Rouvière de Paris : Président d’honneur ; président : Tichit ; vice-présidents : Buisson, Vve Vincent ; trésorier : Reboul ; secrétaire : Quintin ; administrateurs : Raynal, Poudevigne, Folcher et Frès ; porte-drapeau : Robert.
De nombreux combattants des communes voisines assistaient à la réunion.
Ndr : Le même fait est rapporté par La Croix : La Croix – 19 mars 1933 – Le Bleymard – Anciens Combattants.
09 juillet 1933 – Le Bleymard – Concours agricole
Pour la première fois nous avons vu, au Bleymard, un concours agricole et nous devons féliciter le Comice de l’arrondissement de Mende de son heureuse initiative.
De nombreux propriétaires avaient présenté le produit de leur élevage, surtout des bovins et à la distribution de récompenses le président du Comice, M. Bourillon, et le directeur des services agricoles du département ont marqué leur satisfaction pour les résultats obtenus.
Ndr : Résultats du concours dans La Croix : La Croix – 16 juillet 1933 – Le Bleymard – Concours du 27 juin.
04 février 1934 – Cubières – Récompenses
Des médailles d’honneur ont été décernées et des lettres de félicitations adressées à : MM. Folcher, adjoint spécial à Pomaret, Rouvière, instituteur, et l’Abbé Martin curé de Pomaret qui ont accompli des actes de courage et de dévouement pendant les inondations d’octobre 1933.
Sincères félicitations.
04 février 1934 – Cubiérettes – Récompenses
À la suite des inondations d’octobre 1933, des médailles d’honneur ont été décernées et des lettres de félicitations adressées à M. Félix Reboul, maire et M. Roux instituteur pour actes de courage et de dévouement.
Sincères félicitations.
03 juin 1934 – Le Bleymard – Nécrologie
Lundi, à 09 heures au milieu d’une grande affluence de parents et d’amis, ont eu lieu les obsèques de M. Auguste Teissier, de la Remise, décédé subitement, à l’âge de 87 ans.
Malgré son âge avancé, le père Teissier, comme on l’appelait, était très alerte et jouissait encore de toutes ses facultés : sa mort soudaine a frappé notre localité.
À toute la famille, éplorée, nous adressons nos condoléances émues.
1ᵉʳ juillet 1934 – Le Bleymard – Grave accident de la route
Le 21 juin, M. Rouvière, sa femme et sa fille Simone, instituteurs à Pomaret, en rentrant chez eux, furent victimes d’un grave accident d’automobile.
L’accident se produisit entre le tunnel du Tournel et le pont d’Orcières, sur la route de Mende au Bleymard.
Au moment de l’accident, c’est Mlle Rouvière qui conduisait la voiture, et c’est par un faux mouvement que l’automobile dérapa et roula dans un précipice d’une hauteur de 18 mètres, entraînant avec elle ses trois occupants dans la rivière. Ils s’en tirèrent avec des contusions bénignes, sauf Mlle Rouvière qui fut gravement blessée à un pied.
La voiture fut sérieusement endommagée.
03 février 1935 – Cubières – Escroquerie
Deux individus, à la mine soignée, firent à M. et Mme Paul Bargeton, débitants de tabacs à Cubières, de si alléchantes promesses que ces derniers n’hésitèrent pas à leur remettre, en toute confiance, 20 000 francs de titres.
Le coup fait, ces deux escrocs qui paraissaient âgés de 30 à 40 ans, repartirent immédiatement et à toute vitesse en direction de Villefort.
Après réflexion, M. Paul Bargeton fit alerter par téléphone toutes les brigades de gendarmerie des environs.
Les deux escrocs pris entre les barrages de Villefort et des Vans et poursuivis, abandonnèrent leur voiture sur la route, une belle conduite intérieure volée, parait-il, et gagnèrent la clé des champs.
Nous souhaitons que leur arrestation ne tarde guère et engageons une fois de plus les populations rurales à faire preuve d’une plus grande circonspection.
28 février 1936 – Le Bleymard – Succès
Notre jeune compatriote, Mlle Thérèse Rouvière, vient de subir avec succès son cinquième et dernier certificat de licence en philosophie devant la Faculté des Lettres de Clermont-Ferrand.
Nos sincères félicitations à la jeune lauréate ainsi qu’à ses parents, Mme et M. Rouvière, le sympathique maire du Bleymard.
04 janvier 1936 – Saint-Julien-du-Tournel – Accident mortel
M. Toiron, propriétaire à Saint-Julien-du-Tournel, revenant en automobile de Villefort, est tombé accidentellement dans un ravin au lieu dénommé « Maison Blanche » non loin d’Altier.
Sa femme ne le voyant pas revenir alerta les gendarmes de Villefort et de Bagnols-les-Bains qui se mirent à sa recherche et ne retrouvèrent qu’un cadavre qui fut transporté à Villefort.
14 février 1937 – Le Bleymard – État civil de 1936
Naissances :
- Denise-Georgette Frès, le 31 mars
- Simone-Marie-Louise Reversat, le 25 mai
- Jean Cyprien Buisson, le 17 juillet
- Paul-Augustin-Jean Veyrunes, le 29 août
- Jean Lois Reversat, le 17 novembre
Mariages :
- M. Félix Peytavin, menuisier, et Mlle Elisa Griva, le 16 août
- M. Louis Lahondès, propriétaire, et Mlle Harmandine Peytavin, le 17 novembre
- M. Bel René, instituteur, et Mlle Marguerite Coulomb, institutrice, le 16 août
Décès :
- M. Cyprien Boiral, menuisier, le 19 juillet
- M. Paulet Louis, sabotier, le 5 octobre
- Madame Amouroux née Savanier, le 16 août
29 mai 1938 – Le dernier numéro
Le 29 mai 1938 paraissait le dernier numéro du Moniteur de la Lozère.
Les 2ᵉ et 3ᵉ pages étaient composées par les articles de nombreux correspondants locaux dont les deux ci-dessous.
À la une figurait l’annonce de la fin de parution du journal (ci-dessous in fine).
29 mai 1938 – Le Bleymard – Mariage
Nous avons le plaisir d’annoncer le mariage de Mlle Marcelle Buisson du Bonnetès avec M. Paul Reboul du Bleymard.
Tous nos vœux de bonheur aux époux.
29 mai 1938 – Le Mas-d’Orcières
Décès :
- de M Frès Cyprien de Vareilles, 73ans
- de Mlle Ceéestine Martin du Cayre, religieuse âgée de 34 ans
Nos sincères condoléances aux deux familles en deuil.
La commune compte, cette année quatre conscrits : Bresson Armand, du Cheyroux, Diet Antoine d’Orcières, Quet Louis de Vareilles, Gallon Georges du Mazel. Tous ont été reconnus bons pour le service armé.
Nécrologie : dimanche 08 mai, au milieu d’une nombreuse affluence eurent lieu les obsèques de M. Peytavin Joseph, instituteur en retraite. Les instituteurs et institutrices de la région avaient tenu à apporter un dernier hommage au disparu. Au cimetière, M. Jeantet, inspecteur de l’enseignement primaire, exprima les regrets de l’Administration et du personnel enseignant. Il retraça, en termes émus la vie laborieuse et sage de l’excellent maître que fut M. Peytavin.
Aux familles Peytavin, Le Moniteur de la Lozère adresse ses bien sincères condoléances.
29 mai 1938 – Le Moniteur de la Lozère à ses amis
En 1863, paraissait à Mende le premier numéro du Moniteur de la Lozère.
Depuis cette date, depuis 74 ans, Le Moniteur n’a cessé de défendre dans ses colonnes, les idées d’ordre, de liberté et de justice.
Dans la mesure de ses moyens il a apporté une aide sans conditions aux hommes de bonne volonté qui se sont dévoués, en Lozère, à la cause publique.
Il a mené bien des campagnes et reçu bien des coups. Il a le droit de dire sans amertume, que son rôle n’a pas toujours été compris et que lui ont manqué bien des concours sur lesquels il pouvait et devait compter.
C’est le passé.
Aujourd’hui les conditions de vie créées par les récentes lois sociales sont telles que Le Moniteur doit cesser de paraître.
Avec une infinie tristesse, il dit adieu à ses abonnés, à ses amis, à ses collaborateurs connus et inconnus, à tous ceux, en un mot, qui aimaient trouver en lui des informations, certes un peu vieillottes, à la vérité peu retentissantes, mais fleurant bon le sain terroir Lozérien.